Paris (awp/afp) - Le projet de fusion franco-italien entre les deux géants mondiaux de l'optique Essilor et Luxottica a fait un grand pas en avant jeudi avec le feu vert inconditionnel de la Commission européenne, faisant bondir les titres boursiers des deux groupes.

A l'issue d'une enquête approfondie ouverte en septembre 2017, l'exécutif européen est parvenu "à la conclusion que l'opération de concentration n'aurait pas d'effet préjudiciable sur la concurrence" dans le marché unique.

"Nos préoccupations initiales n'ayant pas été corroborées par les résultats de la consultation des acteurs du marché, nous pouvons laisser cette concentration se réaliser sans l'assortir de conditions", a commenté la commissaire européenne à la Concurrence, Margrethe Vestager, cité dans un communiqué.

Cette décision, reportée à maintes reprises et dont la dernière date butoir était fixée au 22 mars, était aussitôt saluée par les marchés: à midi, peu après l'annonce de la Commission, l'action Essilor grimpait de 4,13% à 112,30 euros à la Bourse de Paris, tandis que Luxottica prenait 4,05% à 51,36 euros à Milan.

L'Union européenne faisait partie des cinq juridictions mondiales "où l'approbation par l'autorité de la concurrence est une condition suspensive à la réalisation" de la fusion, ont rappelé Essilor et Luxottica dans un bref communiqué publié après le feu vert de Bruxelles.

Les quatre autres juridictions décisives sont les Etats-Unis, la Chine, le Canada et le Brésil.

Essilor et Luxottica attendent toujours les autorisations des offices anticartels américain et chinois, tandis que l'office anti-trust canadien a déjà dit oui fin novembre et qu'un avis favorable définitif du Brésil est attendu d'ici peu, a précisé jeudi lors d'une audioconférence Laurent Vacherot, directeur général délégué d'Essilor.

- Le calendrier reste inchangé -

Les deux groupes ont répété jeudi qu'ils comptaient finaliser leur union d'ici fin juin 2018. Ils espéraient initialement le faire avant fin 2017, avant de changer de calendrier en raison des délais plus longs que prévu des autorisations réglementaires.

Depuis l'annonce de leur projet de mariage en janvier 2017, les deux groupes n'ont eu de cesse d'assurer que leur union n'allait pas engendrer une situation de monopole, leurs marchés respectifs étant encore très fragmentés.

Par ailleurs il s'agit d'une fusion dite verticale, combinant deux activités différentes, les verres ophtalmiques pour Essilor et les montures pour Luxottica, qui par conséquent "ne se trouvent pas en concurrence", a admis la Commission européenne.

"L'entité issue de la concentration ne serait pas en mesure d'utiliser sa puissance sur le marché des lunettes de soleil pour évincer du marché les fournisseurs de verres concurrents", a encore estimé la Commission.

- Un géant valant 50 mds EUR -

Le nouvel ensemble, qui sera baptisé EssilorLuxottica, doit donner naissance au leader mondial intégré de l'optique, avec un chiffre d'affaires annuel de plus de 16 milliards d'euros et une capitalisation boursière d'environ 50 milliards d'euros.

EssilorLuxottica, dont le siège social sera basé en région parisienne et qui doit être coté à la Bourse de Paris, devrait compter plus de 140.000 employés dans le monde.

Essilor a réalisé l'an dernier un bénéfice net de 789 millions d'euros, en repli de 3% en raison de coûts exceptionnels liés notamment au chantier de fusion.

Mais son chiffre d'affaires a progressé de 5,3%, ou de 6,7% hors effets de change, avec une croissance en base homogène (à taux de change et périmètre constants) de 3,1%, dans les clous de son objectif annuel, à la faveur notamment d'un quatrième trimestre dynamique, surtout aux Etats-Unis et en Chine.

Pour 2018, Essilor vise une croissance de son chiffre d'affaires en base homogène "autour de 4%".

Il table aussi pour 2018 sur une marge opérationnelle ajustée "supérieure ou égale" à son niveau de 2017, soit 18,3% du chiffre d'affaires (contre 18,6% en 2016).

La semaine dernière Luxottica, géant des lunettes de marques principalement sous licence comme Chanel, Prada ou Ralph Lauren, mais qui détient aussi des marques en propre comme Persol, Ray-Ban et Oakley, avait publié un bénéfice net annuel record d'un milliard d'euros, pour un chiffre d'affaires de 9,15 milliards d'euros (+0,8%, ou +2,2% à taux de change constants).

afp/rp