John Carney et David Reilly,

The Wall Street Journal

Une panique bancaire classique, ou "bank run", se définit par des retraits massifs des dépôts de la clientèle. Mardi, JPMorgan (JPM) a introduit une mécanique inverse en dévoilant son intention de pousser certains clients à retirer ce qu'un responsable a qualifié de "mauvais" dépôts.

La banque a annoncé qu'elle prévoyait de réduire le montant total de certains types de dépôts de 100 milliards de dollars d'ici à la fin de l'année. Les fonds indésirables se composent principalement des dépôts "non opérationnels" d'institutions financières.

Le fait que JPMorgan soit disposée à prendre ces mesures en dit long sur le nouveau climat réglementaire, de même que sur les pressions continues exercées par l'extrême faiblesse des taux d'intérêt. Cela montre l'ampleur des défis à relever par les grandes banques cette année pour tenter d'augmenter leurs bénéfices et rendements et à quel point les actionnaires, même dans un contexte plus favorable, ne devraient pas s'attendre à des performances dignes d'avant la crise.

Le spectre de la Fed plane sur les résultats

En réduisant ces dépôts, JPMorgan est principalement motivé par une nouvelle règle de liquidité visant à s'assurer que les banques ont un stock d'actifs sain facilement convertibles en numéraire dans un scénario peu favorable.

JPMorgan et sept autres banques seront, en outre, soumises à des exigences de fonds propres supplémentaires, fondées sur des indicateurs d'importance systémique, dont leur dépendance aux financements à court terme. La manière dont ce supplément sera calculé conformément aux règles proposées par la Fed en décembre "pénalise fortement" les dépôts non opérationnels, selon le directeur financier de Citigroup (C), John Gerspach.

Les charges importantes de fonds propres liées aux dépôts, que ne peuvent financer que des actifs sains à bas rendement, condamnent à une érosion des marges. Il n'est pas étonnant que JPMorgan, qui pense, par cette décision, pouvoir réduire d'un demi-point de pourcentage sa surcharge de fonds propres, souhaite se séparer de ces dépôts.

La hausse des taux n'est pas l'eldorado

Malheureusement (pour les actionnaires des banques), le relèvement tant attendu des taux d'intérêt par la Fed pourrait prendre plus de temps à se mettre en place que ne l'espèrent les investisseurs.

Si la Fed relève ses taux d'intérêt à court terme mais que ceux à plus long terme restent pénalisés par le ralentissement de la croissance mondiale, les problèmes de marges pourraient s'intensifier.

Autrement dit, les perspectives de taux pourraient empirer pour les valeurs bancaires, à un moment où les investisseurs s'attendraient normalement à une amélioration. Parallèlement, davantage de banques pourraient suivre l'exemple de JPMorgan en faisant la chasse aux dépôts peu attrayants.

-John Carney et David Reilly, The Wall Street Journal

(Version française Céline Fabre)