par Huw Jones

LONDRES, 16 décembre (Reuters) - Les banques européennes ont chargé leurs bilans en dette souveraine depuis 2011, ce qui leur a permis d'engranger des bénéfices faciles mais aussi d'alimenter le "cercle vicieux" entre banques affaiblies et Etats aux finances délabrées.

L'Autorité bancaire européenne (ABE), organisme de tutelle des banques de l'Union européenne, observait lundi que la proportion des emprunts émis par les Etats en difficulté et détenus par les banques locales avait "augmenté de façon marquée" de décembre 2010 à juin 2013.

L'exposition nette des banques à la dette souveraine avait baissé de 9% en 2011 pour remonter de 9,3% dans les 18 mois au 30 juin 2013.

Les données de l'ABE confirment ce que beaucoup soupçonnaient: les banques, surtout en Italie et en Espagne, ont consacré l'argent bon marché acquis auprès de la Banque centrale européenne (BCE) à acheter encore plus de leur dette souveraine nationale, une opération de "carry trade" lucrative qui a également permis aux Etats de financer leurs déficits à des taux acceptables.

Un constat susceptible d'alimenter la crainte que les destins des Etats et de leurs banques locales restent trop étroitement liées.

Les données de l'ABE risquent aussi d'alimenter le débat sur la question de savoir si toute dette souveraine doit être considérée comme sans risque lorsqu'il s'agit de calculer les besoins de fonds propres des banques.

En juin 2013, les banques espagnoles détenaient 89% des 199 milliards d'euros de dette souveraine espagnole figurant aux bilans des 64 grandes banques étudiées par l'ABE, contre 78% en décembre 2010.

Les banques italiennes détenaient 76% des 274 milliards d'euros de dette souveraine italienne achetée par les 64 banques, contre 59% en décembre 2010.

Les chiffres pour l'Irlande, la Grèce, Chypre et la Grande-Bretagne sont également élevés, la Finlande étant le seul pays à ressortir avec un pourcentage à un chiffre, soit 6%.

Pour autant, l'ABE constate que ses chiffres confirment que les banques deviennent mieux capitalisées, même si cette capitalisation est plus que jamais localement centrée.

Les fonds propres figurant dans les ratios de base des banques analysées ont augmenté de 80 milliards d'euros de décembre 2011, lors de la dernière mise à jour des donnée, à juin 2013.

Ceci, combiné à une réduction de 817 milliards d'euros des actifs pondérés du risque, en particulier dette titrisée et dérivés, aboutissait à un ratio de fonds propres dur de 11,7% en moyenne contre 10% fin 2011.

Les régulateurs européens font ainsi valoir que, même si leur définition des fonds propres durs n'est pas tout à fait conforme à la règle de Bâle III, les fonds propres des banques européennes se comparent avantageusement à ceux de leurs homologues américaines.

Les grandes banques de l'UE subiront l'an prochain un examen de la qualité de leurs actifs pour s'assurer qu'elles ont été correctement valorisées. La procédure s'accompagnera de tests de résistance et tout déficit en capital sera rendu public en octobre 2014, tout ceci dans le but d'en finir une bonne fois pour toutes avec les doutes quant à la santé réelle des banques du Vieux Continent. (Wilfrid Exbrayat pour le service français, édité par Nicolas Delame)