Block 1 : Les actualités essentielles
Société Générale devient la première banque à lancer un stablecoin dollar sur blockchain publique
Nouvelle avancée pour SG-Forge, la filiale crypto de Société Générale : elle s’apprête à lancer USDCV, un stablecoin adossé au dollar, sur Ethereum et Solana dès juillet. Une première mondiale pour une banque traditionnelle. Après l’EURCV, son stablecoin euro lancé il y a deux ans, SG-Forge étend son offre en s’appuyant sur une collatéralisation chez BNY Mellon et une transparence quotidienne des réserves. L’objectif : proposer un outil fiable et conforme à MiCA, utilisable 24h/24 pour trading, paiements et activité on-chain. Avec USDCV, Société Générale confirme son ambition de devenir un acteur de référence dans l’émission de monnaies numériques européennes régulées.
BlackRock : son ETF Bitcoin bat tous les records
L’IBIT de BlackRock devient l’ETF le plus rapide de l’histoire à franchir les 70 milliards de dollars d’actifs sous gestion, en seulement 341 jours. Ce record tous ETF confondus confirme l’appétit des investisseurs institutionnels pour le bitcoin. Avec 70 milliards de dollars en poche, l’IBIT distance largement les autres ETF spot BTC, qui totalisent en moyenne 48 milliards.
$IBIT just blew through $70b and is now the fastest ETF to ever hit that mark in only 341 days, which is 5x faster than the old record held by GLD of 1,691 days. Nice chart from @JackiWang17 pic.twitter.com/5VeGT9twpQ
— Eric Balchunas (@EricBalchunas) June 9, 2025
The Blockchain Group : 300 M€ pour muscler sa stratégie Bitcoin
Nouvelle levée d’envergure pour The Blockchain Group (ALTBG), qui met en place un programme de financement de 300 millions d’euros en partenariat avec TOBAM. Objectif : renforcer son exposition au BTC, via une émission d’actions hebdomadaire “au prix du marché”, selon une méthode inspirée des techs américaines (ATM).
Les fonds serviront aussi à accélérer les activités autour de la donnée on-chain et de l’infrastructure Bitcoin. ALTBG, déjà pionnière en Europe sur les trésoreries crypto, confirme son ambition de devenir un acteur de référence du Bitcoin en bourse.
Un ETF Solana (SOL) spot dès juillet ? La SEC accélère
Selon des sources proches du dossier, la SEC aurait demandé aux émetteurs d’ETF Solana spot de modifier leur formulaire S-1 d’ici une semaine, signalant une potentielle approbation imminente. Le lancement pourrait intervenir dans 3 à 5 semaines, soit bien avant la date limite initiale d’octobre. Ce calendrier accéléré coïncide avec la nouvelle posture pro-crypto du président de la SEC, Paul Atkins. Ces ETF pourraient même inclure du staking, une demande récurrente des investisseurs.
Block 2 : L’Analyse Cryptique de la semaine
Wall Street fait une ovation à Circle. L’émetteur de stablecoins à l’origine de l’USDC a signé l’une des introductions en Bourse les plus spectaculaires de l’année. Cotée à 31 dollars sous le ticker CRCL, l’action a grimpé à plus de 83 dollars dès le premier jour, soit une envolée de +168 %, et se négocie désormais à 119 dollars. Un succès fulgurant pour une entreprise dont le nom est intimement lié à la tokenisation du dollar.
Pour Circle, cette IPO sonne comme une consécration. Après l’échec de sa fusion avec une SPAC en 2022, la société s’est recentrée sur l’essentiel : faire de l’USDC la pierre angulaire de la finance régulée sur blockchain.
Mission accomplie : avec 61,5 milliards de tokens en circulation, 29% de part de marché, une transparence rigoureuse, et des réserves intégralement garanties par des bons du Trésor américains, l’USDC est devenu le deuxième stablecoin mondial, derrière Tether — mais premier en matière de conformité réglementaire.

CoinGlass
D’ailleurs, le vrai levier de Circle, c’est son ADN réglementaire. Tandis que l’Europe encadre déjà les stablecoins via MiCA, les États-Unis s’apprêtent à suivre avec le GENIUS Act. Si ce texte voit le jour, Circle pourrait être l’un des premiers émetteurs autorisés à proposer des “Covered Stablecoins”, c’est-à-dire des stablecoins garantis par des actifs sûrs et réglementés, dans le cadre juridique proposé par les États-Unis — un sésame qui pourrait lui offrir un quasi-monopole aux yeux des institutions financières.
Circle émet également un stablecoin adossé à l’euro : EURC. Ce dernier a vu sa demande exploser en avril, sur fond de tensions douanières entre Washington et Bruxelles et d’un affaiblissement de l’euro-dollar. Surtout, le retrait de l’Euro Tether (EURT) face aux exigences du règlement MiCA a laissé un vide que Circle s’est empressé de combler. Résultat : EURC est devenu le stablecoin de référence en Europe pour les acteurs régulés.
Au cœur de la machine Circle : le Circle Payments Network (CPN). C’est la colonne vertébrale de l’entreprise. Une architecture technologique multistrates qui combine stablecoins, gestion des réserves bancaires, rampes fiat, et déploiement blockchain multi-chaînes. En clair : Circle ne se contente pas d’émettre de la monnaie numérique. Elle construit l’autoroute mondiale pour l’échanger, la transférer, la convertir.

Circle.com
Contrairement à une banque traditionnelle qui manipule directement les fonds, Circle agit comme une couche de transaction programmable. Elle propose l’infrastructure, les rails de règlement, et les jetons numériques (USDC, EURC), mais externalise la garde et la conversion des monnaies fiat à ses partenaires bancaires. C’est ce positionnement hybride — entre finance traditionnelle et internet de la valeur — qui la distingue radicalement d’une banque classique. Circle n’est pas un intermédiaire, c’est un catalyseur.
Cette séparation entre infrastructure et liquidité est plus qu’un choix stratégique : c’est un avantage concurrentiel massif. Une véritable douve économique qui positionne Circle comme fournisseur critique d’une finance tokenisée en devenir. Car à mesure que les institutions mondiales passent de l’expérimentation à l’adoption réelle de la blockchain, c’est ce type d’architecture qui devient incontournable.
Et Circle ne compte pas s’arrêter là. En 2024, la société a lancé USYC, une version tokenisée d’un fonds monétaire américain en bons du Trésor, après l’acquisition de Hashnote. Un virage important vers les actifs réels tokenisés (Real-World Assets, ou RWA), nouvelle frontière de la finance numérique. C’est l’un des segments les plus dynamiques de l’industrie aujourd’hui.
Contrairement à l’USDC ou à l’EURC, ancrés à la valeur d’une devise pour servir de monnaie transactionnelle, USYC joue dans une autre cour. Ce nouveau produit signé Circle est porte-rendement, adossé à des bons du Trésor américain à court terme. Sa fonction ? Offrir aux investisseurs une exposition tokenisée au marché obligataire U.S. — tout en restant dans l’univers on-chain. Et le pari commence à payer : USYC représente déjà 5,5% du marché des bons du Trésor tokenisés, qui pèse aujourd’hui 7,32 milliards de dollars, après une croissance de 400% en un an, et de 78% rien que sur 2025.
Mais cette montée en puissance d’USYC ne se fait pas au détriment d’USDC — au contraire. Ensemble, les deux actifs créent une synergie puissante, un stack financier modulaire à la sauce blockchain. L’idée ? Permettre aux institutions de basculer en un clic entre liquidité immédiate (USDC) et rendement sécurisé (USYC), comme elles le feraient dans les marchés traditionnels entre du cash et des fonds monétaires. Résultat : une gestion fluide de la trésorerie sans sortir de l’écosystème Circle.
Ce combo USDC + USYC pourrait bien devenir la norme pour la gestion de collatéraux dans les échanges crypto, chez les dépositaires institutionnels, ou les brokers spécialisés.
Circle n’a pas raté son entrée en Bourse — et ses chiffres du premier trimestre confirment que le moteur est bien lancé. La société a généré 578,6 millions de dollars de revenus, en hausse de 58,5% sur un an. La plus grande partie vient des revenus de réserve, issus des bons du Trésor américains adossés à l’USDC, qui ont bondi de 55,1% grâce à une explosion de 78% du volume d’USDC en circulation. Le business model est limpide : plus il y a de stablecoins émis, plus les intérêts sur les actifs sous-jacents rapportent.

Circle
Mais un autre chiffre intrigue : +278 % sur les revenus d’intégration. Ces services, bien que ne représentant encore "que" 20,7 millions de dollars, traduisent une demande croissante pour la stack technologique de Circle, et pourraient devenir demain une source de revenus récurrents, moins sensible aux taux d’intérêt. Une vraie assurance contre les baisses à venir de la Fed.
Face à cette montée en puissance, les coûts de distribution et de transaction ont logiquement grimpé de 68%, une hausse liée notamment à l’accord de partage des revenus avec Coinbase, qui récupère 50% des revenus liés à USDC. Voilà pourquoi Circle cherche à s’émanciper partiellement avec ses revenus “hors réserve”, en se recentrant sur l’infrastructure réglementée et modulaire, en coupant court à certains services jugés trop risqués ou peu rentables. Exit donc Circle Yield ou les services de paiement Web3, trop exposés aux vents réglementaires. Ces produits n’apportaient de toute façon moins de 1% des revenus.
Résultat ? Une entreprise plus lisible, plus attractive, et surtout rentable : 92,9 millions de dollars de revenus d’exploitation, en hausse de 77,6%. Côté bilan, c’est également du solide : 62,26 milliards d’actifs, dont 60,14 milliards de cash ou équivalents en réserve (adossés à l’USDC) — soit une hausse de 36,9% sur un an, parfaitement alignée avec les passifs (les dépôts des détenteurs de stablecoins), eux-mêmes en hausse de 37,2%.
Les capitaux propres ne sont pas en reste : +30,6% à 745 millions de dollars, tandis que le goodwill grimpe de 56,9%, probablement suite au rachat de Hashnote en janvier. Et ce n’est pas fini : l’IPO vient d’ajouter 435,9 millions de dollars nets à la trésorerie, une bouffée de liquidités qui propulse le potentiel de croissance de Circle sur la scène publique.
Circle ne vend plus seulement un stablecoin. Elle vend une structure, un modèle, un pont entre le Web3 et Wall Street. Et désormais, elle joue dans la cour des grands. Mais derrière l’enthousiasme affiché en Bourse, le modèle économique de Circle reste suspendu à plusieurs fils.
Le premier, et sans doute le plus tendu, s’appelle Fed Funds Rate. Car si Circle engrange aujourd’hui des centaines de millions grâce aux intérêts des bons du Trésor adossés à l’USDC, c’est uniquement parce que les taux restent élevés. Mais qu’adviendra-t-il lorsque la Fed desserrera l’étau ? Si les taux retombent, la rente s’évapore. L’USDC continuera de circuler, certes, mais les revenus générés par les réserves fondront comme neige au soleil. Circle le sait, et c’est précisément pour cette raison qu’elle cherche à élargir sa base de revenus — en misant sur ses briques technologiques, ses services d’intégration, et ses projets comme USYC.
Autre vulnérabilité : la dépendance absolue à l’USDC. Le stablecoin représente toujours l’épine dorsale de l’entreprise. Si son adoption ralentit, si un choc réglementaire ou une attaque concurrentielle venait à fragiliser sa domination, c’est tout l’édifice Circle qui vacillerait. L’EURC et USYC sont des débuts de réponse — mais pour l’instant, ils restent anecdotiques face au géant USDC.
Et puis il y a la régulation. Circle joue la carte de la conformité avec brio. Elle se positionne comme le bon élève du Web3, prêt à cohabiter avec les régulateurs. Mais cette posture a un prix : si le futur cadre légal (comme le GENIUS Act aux États-Unis) venait à imposer des contraintes trop strictes, Circle pourrait se retrouver piégée dans une logique de surconformité, incapable de rivaliser avec des acteurs plus souples, moins régulés — mais plus rapides.
Enfin, un point que Wall Street n’ignore pas : malgré la croissance impressionnante, le modèle reste fragile s’il ne parvient pas à générer des revenus structurellement diversifiés. Pour le moment, tout repose sur une rente liée aux taux d’intérêt et sur un seul actif numérique. Si Circle ne parvient pas à faire émerger des flux récurrents indépendants des T-bills, la prime actuelle de valorisation pourrait vite se transformer en poids mort.
Palmarès des cryptomonnaies
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Block 3 : Lectures de la semaine
Ross Ulbricht a reçu un don de 31 millions de dollars d’un courtier du Dark Web, suspecté par des traceurs de cryptos (Wired, en anglais)
Au Bitcoin 2025, les puristes de la crypto et les fidèles de MAGA s’affrontent (Wired, en anglais)
Le bûcher des régulateurs bancaires (Project Syndicate, en anglais)