Les principaux pôles européens de centres de données pourraient connaître un bouleversement majeur, les développeurs s'implantant là où les temps de connexion sont les plus courts, à moins d'une planification plus proactive du réseau électrique, selon un rapport publié jeudi par le groupe de réflexion énergétique Ember.

La construction de centres de données a explosé ces dernières années, les entreprises technologiques se livrant une course pour proposer les modèles d'intelligence artificielle (IA) les plus performants, lesquels reposent sur une nouvelle génération de centres de données particulièrement énergivores.

Selon ce rapport, cette tendance pourrait entraîner un déplacement géographique des investissements en Europe, les développeurs cherchant de nouveaux sites offrant un accès plus facile à l'électricité et des délais de raccordement plus courts.

D'ici 2035, la moitié de la capacité des centres de données européens pourrait être située en dehors des principaux pôles actuels que sont Francfort, Londres, Amsterdam, Paris et Dublin, indique le rapport.

Une telle évolution pourrait priver ces pays congestionnés de milliards d'euros d'investissements : en Allemagne, les centres de données ont contribué à hauteur de 10,4 milliards d'euros (12 milliards de dollars) au PIB en 2024, un chiffre qui devrait plus que doubler d'ici 2029. Ce phénomène pourrait également freiner la croissance de l'emploi, selon le rapport.

Seule la France devrait maintenir un niveau d'investissement continu dans les centres de données, son réseau électrique restant relativement peu contraint, précise le rapport.

Le raccordement d'un nouveau centre de données au réseau dans les pôles historiques peut prendre en moyenne de 7 à 10 ans, certains projets accusant même des retards allant jusqu'à 13 ans, indique le rapport.

En revanche, les délais d'attente sont bien plus courts sur les marchés émergents, l'Italie ne nécessitant que trois ans, selon le rapport.

« Ce sont finalement les réseaux électriques qui décident de l'orientation des investissements... Ils deviennent aujourd'hui un véritable outil d'attractivité », souligne Elisabeth Cremona, analyste senior en énergie chez Ember.

« Dans la course de l'Europe à la compétitivité et à la croissance économique, il est désormais essentiel de prendre en compte les réseaux électriques et d'y diriger les investissements si l'on souhaite voir d'autres projets se concrétiser », ajoute-t-elle.

Elle précise que cette problématique ne se limite pas aux centres de données mais concerne l'ensemble de l'industrie, toute activité nouvelle ou en voie d'électrification devant faire face aux mêmes enjeux.

En Suède, Norvège et Danemark, la demande d'électricité des centres de données devrait déjà tripler d'ici 2030. En Autriche, Grèce, Finlande, Hongrie, Italie, Portugal et Slovaquie, la consommation des centres de données devrait être multipliée par trois à cinq d'ici 2035 par rapport à 2024.

(1 $ = 0,8692 euros)