La cour d'appel de Versailles a validé jeudi l'ouverture des procédures de sauvegarde de Dame Luxembourg et de sa société fille Heart of La Défense (Hold), propriétaire de "Coeur Défense", le plus gros ensemble de bureaux d'Europe.

Cette décision de la cour d'appel de Versailles, qui était appelée à se prononcer à la suite d'un arrêt de cassation, place Hold en position de force par rapport à ses créanciers, qui estimaient que la société ne pouvait bénéficier d'une procédure de sauvegarde.

"La sauvegarde est ouverte à la demande d'un débiteur qui justifie de difficultés, qu'il n'est pas en mesure de surmonter, de nature à la conduire à la cessation des paiements", a rappelé la cour jeudi, en constatant que Hold et sa maison mère répondaient à ces conditions.

L'avocat des deux sociétés, Me Jean-Philippe Robé, a salué cette décision "d'une grande importance pour la communauté juridique et financière française". "Elle confirme l'arrêt de la Cour de cassation du 8 mars 2011 qui implique que les holdings et les SPV (Special Purpose Vehicle, ou fonds commun de créances, NDLR) peuvent bénéficier d'une procédure de sauvegarde", a-t-il ajouté dans un communiqué.

Le 8 mars 2011, la Cour de cassation avait déjà rendu une décision favorable à Hold, en annulant l'arrêt de la cour d'appel de Paris qui avait invalidé en février 2010 l'ouverture de la procédure de sauvegarde au bénéfice de Hold et de Dame Luxembourg, détenus par des fonds immobiliers du groupe Lehman Brothers.

Les tours de Coeur Défense, le plus grand ensemble de bureaux d'Europe avec une surface de 180.000 mètres carrés, avaient été rachetées en 2007 à la foncière Unibail-Rodamco (>> UNIBAIL-RODAMCO) au prix fort de 2,1 milliards d'euros. Cette acquisition avait été financée par un emprunt titrisé de 1,6 milliard d'euros.

Parmi les détenteurs de ces titres de dette, regroupés au sein du fonds Windermere XII FCT géré par la société Eurotitrisation, se trouvent BNP Paribas (>> BNP PARIBAS), Axa (>> AXA), Dexia (>> DEXIA) et Crédit Foncier, filiale de BPCE.

Interrogé par Dow Jones Newswires, l'avocat du fonds commun de titrisation, Gilles Saint-Marc, a dit "prendre bonne note" de l'arrêt de la cour d'appel, mais n'a pas souhaiter le commenter davantage à ce stade. Eurotitrisation n'était pas immédiatement joignable.

Créancier et propriétaires de Coeur Défense sont en conflit depuis la faillite de la banque américaine Lehman Brothers en septembre 2008, qui ne pouvait plus assurer la couverture de risque de variation de taux d'intérêt du prêt de Hold.

La société propriétaire estimait par ailleurs que les conditions de marché très dégradées en raison de la crise financière ne lui permettaient pas de proposer à ses créanciers une nouvelle couverture, comme le stipulaient pourtant ses obligations contractuelles.

Pour éviter de se retrouver en défaut, Hold avait obtenu du tribunal de commerce de Paris l'ouverture d'une procédure de sauvegarde en novembre 2008, suivie par la mise en place d'un plan de sauvegarde en septembre 2009. Ce plan prévoit notamment le report du remboursement de la dette à juillet 2014.

Mais le 25 février 2010, la cour d'appel de Paris avait invalidé l'ouverture de la procédure de sauvegarde, et donc par ricochet le plan de sauvegarde, estimant que Hold ne pouvait justifier de difficultés économiques l'empêchant de poursuivre son activité de bailleur. Ce raisonnement a été remis en cause par la Cour de cassation le 8 mars 2011, et jeudi par la cour d'appel de Versailles.

Cette dernière "confirme que tout type de difficultés permet d'ouvrir une sauvegarde, dès lors que ces difficultés sont d'une importance telle que le débiteur ne peut y faire face seul", a souligné Me Robé.

La mise en oeuvre du plan de sauvegarde reste suspendue, le parquet général ayant la possibilité de le contester devant la cour d'appel de Versailles au plus tard jusqu'au début mars 2013.

Les loyers versés par les entreprises locataires de Coeur Défense sont actuellement perçus par les créanciers de Hold en vertu d'une décision du tribunal de commerce de Paris du 19 octobre 2009, susceptible toutefois d'être contestée par les propriétaires.

-Martine Pauwels, Dow Jones Newswires; +33 (0)1 40 17 17 69; martine.pauwels@dowjones.com

Valeurs citées dans l'article : UNIBAIL-RODAMCO, BNP PARIBAS, AXA, DEXIA