(actualisé avec Mike Pompeo § 1-7-8)

SEOUL, 3 mai (Reuters) - Des coups de feux ont été tirés depuis la Corée du Nord vers un poste frontière sud-coréen tôt dimanche matin, annonce l'état-major des forces sud-coréennes, qui écarte a priori la piste d'une provocation. A Washington, le chef de la diplomatie américaine, Mike Pompeo, a évoqué des "tirs accidentels".

Des soldats sud-coréens ont néanmoins répliqué, tirant deux coups de feu vers la Corée du Nord; il n'y a pas eu de blessés.

Cet accès de tension à la frontière entre les deux Corées survient au lendemain du retour dans l'espace public du dirigeant nord-coréen Kim Jong-un après une absence de près de trois semaines qui a alimenté rumeurs et spéculations sur son état de santé.

Les incidents de ce type sont rares le long de la Zone démilitarisée (DMZ), la ligne de démarcation qui sépare les deux Corées depuis l'armistice de 1953. Techniquement, les deux pays sont toujours en état de guerre, aucun traité de paix n'ayant été conclu après la guerre de 1950-1953.

Dans un communiqué, l'état-major des forces sud-coréennes précise que les premiers coups de feu ont été tirés en provenance du nord à 07h41 heure locale (samedi à 22h41 GMT).

L'état-major a admis ne pas avoir une explication claire de la raison de ces tirs mais estime cependant qu'ils ne ressemblent pas à une provocation planifiée.

A Washington, le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo a minimisé l'incident. "Quelques tirs sont venus du nord, nous pensons qu'ils étaient accidentels. Les Sud-Coréens ont riposté. A notre connaissance, aucune vie n'a été perdue de part et d'autre", a-t-il dit à ABC News.

Le chef de la diplomatie américaine a par ailleurs refusé de dire si des éléments en sa possession établissaient que Kim Jong-un a été ou non gravement malade durant son absence. "Il y a déjà eu de longues périodes pendant lesquelles le président Kim était absent de l'espace public, ce n'est donc pas inédit", a-t-il dit.

Choi Kang, vice-président de l'Institut asiatique des études politiques, parle pour sa part d'une "provocation" dont le timing, avance-t-il, vise à démontrer que Kim Jong-un reste bien le maître des forces nord-coréennes.

"Hier, Kim voulait montrer qu'il était en parfaite santé", dit-il en évoquant son inauguration très couverte par les médias nord-coréens d'une usine d'engrais située à Sunchon, au nord de Pyongyang, sa première apparition officielle depuis le 11 avril.

"Aujourd'hui, poursuit-il, Kim veut faire taire toutes les spéculations selon lesquelles il n'aurait pas un contrôle total de l'armée". "Plutôt que d'aller jusqu'à tirer des missiles et de superviser un tir de missile, Kim cherche peut-être à nous rappeler que, oui, il est en bonne santé et toujours aux commandes."

SÉOUL NE CROIT PAS À LA THÈSE DE L'OPÉRATION CHIRURGICALE

Leif-Eric Easley, qui enseigne les relations internationales à l'université Ewha de Séoul, estime pour sa part que l'incident survenu à la frontière pourrait être destiné à renforcer le moral de l'armée du Nord et, ajoute-t-il, "à récupérer un avantage dans les négociations que Kim a perdu durant ces semaines de rumeurs autour de son absence".

"La Corée du Sud et les Etats-Unis, poursuit-il, ne devraient pas prendre à la légère de telles violations des accords militaires existants de la part des Nord-Coréens."

Le Commandement des Nations unies en Corée, sous direction américaine et qui supervise notamment les activités sur la DMZ, a annoncé qu'il coopérait avec l'état-major de l'armée sud-coréenne en vue "de déterminer s'il y a eu violation de l'accord d'armistice".

Citant un haut responsable de la présidence sud-coréenne, l'agence de presse sud-coréenne Yonhap rapporte de son côté que Séoul ne pense pas que Kim Jong-un a subi une intervention chirurgicale lors de sa longue absence.

En examinant les photos et les vidéos de la visite du dirigeant nord-coréen à Sunchon diffusées samedi par les médias de Pyongyang, plusieurs experts du régime ont noté la démarche raide et saccadé de Kim.

"Il y a eu des articles spéculatifs indiquant que le président Kim avait subi une intervention chirurgicale sur la base de sa démarche. Nous avons des raisons de penser qu'il n'y a pas eu d'opération, mais ne nous pouvons pas en divulguer les détails", a dit ce responsable à Yonhap. (Cynthia Kim, Hyonhee Shin et Josh Smith version française Camille Raynaud et Henri-Pierre André)