* Mediapart dit poursuivre son enquête sur des fraudes fiscales

* Le site dispose d'informations encore à vérifier dit Plenel

* Si elles impliquaient un autre politicien, ce serait un séisme, dit-il (Avec déclarations d'Edwy Plenel à Reuters)

PARIS, 5 avril (Reuters) - Le "séisme" politique provoqué par l'affaire Cahuzac n'est peut-être pas fini, a estimé vendredi Edwy Plenel, fondateur du site internet Mediapart, qui a révélé l'existence du compte bancaire secret qui a fait chuter l'ex-ministre du Budget.

"Nous avons diverses informations qui nous parviennent (...)sur lesquelles nous travaillons", a déclaré à Reuters l'ancien directeur de la rédaction du quotidien Le Monde.

"Je pense que cette question de la fraude et de l'évasion fiscale n'est pas terminée pour la classe dirigeante française dans son ensemble", a-t-il ajouté.

Dans une émission enregistrée jeudi par la chaîne de télévision France Ô pour diffusion dimanche, il juge nécessaire un "sursaut démocratique et social" en France.

"On ne peut pas continuer à être dirigé par des gens qui se croient au-dessus des lois qu'ils votent", explique-t-il.

Prié de dire, dans cet extrait, si la France se dirige vers un "scandale d'Etat", il répond : "Vers un scandale républicain parce que c'est toute la République qui est concernée".

Dans un entretien avec Reuters, Edwy Plenel a cependant précisé que les informations en possession de Mediapart devaient d'abord être recoupées et vérifiées avant d'être publiées.

"Je ne peux pas en être sûr à cette date. Mais vous avez Cahuzac. Vous avez déjà Jean-Jacques Augier (l'ex-trésorier de la campagne du président François Hollande-NDLR) dans un paradis fiscal, vous avez toutes les histoires Sarkozy qui peuvent rebondir", a-t-il poursuivi.

"Dans l'affaire Takieddine, il y a des paradis fiscaux partout (...) Supposez que demain, après-demain, on ait de nouvelles informations sur un responsable politique quel qu'il soit, le séisme républicain est là", a-t-il ajouté.

UNE DROITE "OUBLIEUSE"

En dehors de l'affaire Cahuzac, le site Mediapart, spécialisé dans le journalisme d'investigation, a publié nombre d'informations mettant en cause des dirigeants de l'ancienne majorité, dont l'ex-président Nicolas Sarkozy.

Il a notamment diffusé un enregistrement effectué par un ex-majordome de la milliardaire Liliane Bettencourt, des éléments sur l'attentat de Karachi contre des techniciens français de la DCNS et des informations sur les relations entre l'homme d'affaire Ziad Takieddine et de hauts dirigeants de l'UMP.

L'ancienne majorité, qui multiplie accusations et attaques contre le gouvernement socialiste depuis les aveux et la mise en examen de Jérôme Cahuzac, est "oublieuse", dit Edwy Plenel.

Des élus ont émis l'hypothèse que la détention par l'ex-ministre du Budget d'un compte secret en Suisse, puis à Singapour, était non seulement connue de l'actuel gouvernement mais aussi du temps où l'UMP dirigeait le pays.

L'UMP Michel Gonelle, ancien rival de Jérôme Cahuzac dans le Lot-et-Garonne, a ainsi déclaré jeudi sur Europe 1 que des informations douanières en faisaient état depuis 2008.

L'ancien ministre centriste Hervé Morin a lui aussi accrédité l'idée que la droite savait, affirmant dans Le Parisien que "la rumeur parisienne était constante".

Le député écologiste Noël Mamère a suggéré que le précédent exécutif connaissait la situation de Jérôme Cahuzac quand, alors député socialiste, il a été nommé en 2010 à la présidence de la commission des Finances de l'Assemblée nationale sur proposition du PS mais avec l'accord de Nicolas Sarkozy.

"J'entends beaucoup la droite interpeller le président de la République et le Premier ministre sur le thème : 'Comment ? vous ne saviez pas ?' Mais on peut poser la même question à Nicolas Sarkozy qui a laissé Jérôme Cahuzac devenir président de la commission des Finances", a-t-il dit. (Jean-Baptiste Vey, Gérard Bon et Emmanuel Jarry, édité par Yves Clarisse)