Les magistrats de trois villes italiennes qui enquêtent sur la banque toscane doivent convoquer de nouveaux témoins la semaine prochaine à la suite des témoignages apportés par une kyrielle de banquiers, rapporte la presse.

Il est reproché à Banca Monte dei Paschi di Siena d'avoir procédé à des transactions de dérivés risquées de 2006 à 2009 pour maquiller ses comptes, transactions qui risquent de lui coûter 720 millions d'euros de pertes et de la rendre dépendante d'une aide publique.

L'ex-président du Conseil Silvio Berlusconi tente de profiter du scandale pour réduire l'écart sur ses adversaires du centre gauche, dans la perspective des élections législatives des 24 et 25 février.

Le tribunal administratif de Rome a débouté samedi la puissante association de consommateurs Codacons en refusant de bloquer l'émission par la Banque d'Italie de 3,9 milliards d'euros d'obligations spéciales destinées à renflouer Monte Paschi. Le tribunal a fixé une nouvelle audience au 20 février.

Après l'audience, la Codacons a réclamé la démission du gouverneur de la banque centrale Ignazio Visco et la nomination d'un administrateur judiciaire pour Monte Paschi.

Elle poursuit la Banque d'Italie et lui réclame 3,9 milliards d'euros de dommages et intérêts, soit le même montant que l'opération obligataire qu'elle voulait bloquer.

"EFFETS CATASTROPHIQUES

La Toscane est traditionnellement une région qui vote à gauche et Monte Paschi a noué d'étroites et anciennes relations avec les formations de gauche telles que le Parti démocrate, maillon fort de la coalition d'opposition de centre-gauche.

"Nous sommes certains que la gauche italienne a beaucoup à dire (sur Monte Paschi) mais au lieu de cela, elle se tait", a dit samedi Angelino Alfano, candidat de centre-droit au poste de président du Conseil.

"Les gens veulent de la clarté et veulent savoir s'il y a un lien entre les décisions de la gauche italienne et leurs effets catastrophiques sur une banque aussi importante".

Les sondages d'opinion laissent penser que le scandale n'a pour l'heure que peu d'incidences sur les intentions de vote du scrutin, que le centre-gauche paraît devoir remporter, encore que les écarts se comblent.

En dehors des transactions de dérivés douteuses, les magistrats se demandent si des pots-de-vin ont été versés en 2007, lorsque Monte Paschi a racheté la banque Antonveneta pour neuf milliards d'euros, une ardoise qui elle aussi a soulevé un flot de critiques.

En tout état de cause, le scandale parti des paysages vallonnés de Toscane s'étend maintenant jusqu'à Francfort, ville qui héberge la Banque centrale européenne (BCE).

Le scandale Monte Paschi prend en effet sa source à l'époque où Mario Draghi, l'actuel président de la BCE, dirigeait la Banque d'Italie, soit de 2006 à 2011.

Même si elle a exprimé les plus vives préoccupations vis-à-vis de Monte Paschi dès 2009, la Banque d'Italie a révélé qu'elle avait attendu fin 2011 pour convoquer la direction de la banque, les sanctions ne tombant qu'après que l'équipe dirigeante d'alors eut démissionné l'an passé.

Mario Borghezio, député européen représentant la Ligue du Nord italienne, a dit avoir soumis à la Commission européenne la question de savoir si Mario Draghi présentait toutes les qualités pour superviser les banques de la zone euro.

Wilfrid Exbrayat pour le service français

par Philip Pullella