* L'Union africaine n'a que $5 mlns pour la Misca

* L'UE promet E25 mlns, plus 20 mlns pour les élections

* Le Pam lance lui aussi un appel aux donateurs (Actualisé avec création d'un mouvement indépendantiste dans le Nord)

par Aaron Maasho et Edmund Blair

ADDIS-ABEBA, 31 janvier (Reuters) - L'Onu a invité les pays donateurs, qui se réunissent samedi à Addis-Abeba, à accroître leur contribution au financement du déploiement des soldats de la paix africains en Centrafrique.

La priorité, a souligné vendredi le secrétaire général adjoint des Nations unies, Jan Eliasson, est de soutenir la Mission internationale de soutien à la Centrafrique sous conduite africaine (Misca), pilotée par l'Union africaine.

Le fonds mis en place pour la financer ne dispose que d'un peu plus de cinq millions de dollars (3,7 millions d'euros).

"La situation est grave, nous avons vu des violations massives des droits de l'homme et des violations du droit humanitaire international", a déclaré le diplomate, interrogé par Reuters en marge d'un sommet de l'Union africaine.

Sibut, localité qui marque l'entrée dans la partie nord du pays, est devenue récemment l'un des points chauds du conflit. Des ex-rebelles musulmans de la Séléka y sont arrivés cette semaine et des exécutions y ont été signalées, a indiqué un membre du personnel humanitaire.

Les miliciens de la Séléka "se sont regroupés à Sibut. Ce sont des éléments qui ont perdu le pouvoir et qui essayent de se reconstituer", a-t-il déclaré, parlant d'un risque de partition du pays.

La création d'un "Mouvement Indépendantiste Nord-Centrafricain" a d'ailleurs été annoncée via un courrier électronique repris vendredi par la presse locale.

"Ce mouvement qui regroupe toutes les forces vives du Nord-Centrafrique dans leur ensemble sans distinction religieuse, régionale ou ethnique vise les objectifs suivants: la libération totale du Nord-Centrafrique de la domination sudiste; la reconnaissance des droits de la population du Nord à leur terre et à la liberté et aux choix au choix politiques; et enfin la création d'un Etat démocratique, laïque, indépendant, souverain, reconnu par la communauté internationale et respecté", écrivent ses auteurs.

L'authenticité du document n'a pu être vérifiée, mais Peter Bouckaert, coordinateur des opérations d'urgence de Human Rights Watch qui se trouve en Centrafrique l'a jugé crédible.

La Misca dispose pour l'instant d'un peu plus de 5.000 hommes, qui, avec les 1.600 militaires français de l'opération Sangaris, ont beaucoup de mal à désarmer les milices et à ramener le calme.

Depuis la prise du pouvoir en mars 2013 par les rebelles de la Séléka, essentiellement musulmans, 2.000 personnes ont été tuées et près d'un million de personnes, soit un quart de la population, ont été déplacées.

L'Union européenne, qui s'est engagée à envoyer 500 soldats, est prête à allouer 25 millions d'euros au fonds pour la Misca et à mettre sur la table 20 millions d'euros supplémentaires dans l'organisation des élections.

BESOIN URGENT

Selon Andris Piebalgs, commissaire européen chargé du Développement, avec ces sommes, l'engagement total de l'UE en Centrafrique depuis le début de la crise atteindra environ 200 millions d'euros.

A terme, les effectifs de la Misca doivent monter à 6.000, mais la France estime que ce chiffre est insuffisant. Paris souhaite, avec d'autres, la transformation de la Misca en une opération de maintien de la paix des Nations unies.

Selon l'ambassadeur de France auprès des Nations unies Gérard Araud, une telle transformation permettrait de garantir le financement.

Pour Jan Eliasson, le nombre de soldats de la paix nécessaires dépendra de la situation politique qui prévaudra avec la nouvelle présidente par intérim Catherine Samba-Panza.

Il souligne qu'il est difficile de lever des fonds pour la Centrafrique parce que les donateurs sont très sollicités, ne serait-ce que par le dernier appel de six milliards de dollars des Nations unies pour la Syrie.

Selon le directeur de l'Union africaine pour la paix et la sécurité, El Ghassim Wane, la Misca, qui a 5.300 soldats sur le terrain, en attend encore 700 de la République démocratique du Congo (RDC), ce qui portera le total aux 6.000 prévus.

"Je peux vous assurer qu'à la fin du programme en mars, la totalité des troupes sera sur le terrain", a-t-il dit.

Le Programme alimentaire mondial (Pam), qui a fourni une aide alimentaire à 220.000 personnes déplacées, a elle aussi lancé un appel aux bonnes volontés vendredi.

Elle dit avoir un besoin "urgent" de 95 millions de dollars pour pouvoir distribuer immédiatement de l'aide alimentaire et constituer des réserves avant le début des pluies en avril. A ce moment-là, les routes deviendront impraticables, souligne le Pam dans un communiqué. (Danielle Rouquié et Jean-Philippe Lefief pour le service français, édité par Bertrand Boucey)