* Letta a multiplié les entretiens

* Il pourrait présenter son programme en début de semaine

* Berlusconi pensent que les différends peuvent être aplanis (Actualisé avec consultations, citations de Monti)

par Paolo Biondi

ROME, 25 avril (Reuters) - Le dirigeant de centre-gauche Enrico Letta pourrait donner dès samedi à l'Italie un nouveau gouvernement de coalition et se présenter en début de semaine devant le Parlement pour exposer son programme, a-t-on appris vendredi de sources politiques.

Le numéro deux du Parti démocrate (PD, centre-gauche) a poursuivi ses consultations pour aplanir ses derniers différends avec le Peuple de la liberté (PDL, droite) de Silvio Berlusconi, après une première série de discussions jeudi.

Enrico Letta est prié de faire vite après deux mois de blocage politique dû à l'absence de vainqueur net aux élections législatives de février.

Le président du Conseil désigné a eu de longs entretiens avec le président de la République, Giorgio Napolitano, avec le président du Conseil sortant, Mario Monti, et avec le coordinateur national du PDL, Angelino Alfano.

Dans une interview à la chaîne de télévision La7 vendredi soir, Mario Monti a dit avoir conseillé à Enrico Letta de ne placer aucun responsable politique de premier plan à la tête des principaux ministères pour réduire le risque de tensions. Mario Monti a précisé qu'en vertu de ce principe, il ne devrait pas lui-même figurer dans le gouvernement.

"Je ne crois pas que je serai au gouvernement et je ne l'ai pas demandé", a-t-il dit.

Enrico Letta se garderait la journée de dimanche pour préparer son discours de politique générale qu'il prononcerait devant le Parlement lundi. La nouvelle équipe se présenterait ensuite devant les deux chambres pour obtenir le feu vert des élus.

Un des principaux différends à résoudre entre la gauche et la droite concerne l'abolition, demandée par le PDL de Berlusconi, de la taxe sur les résidences principales (ou impôt municipal unique, Imu) réintroduite l'an dernier par le gouvernement de Mario Monti. Le PDL exige aussi le remboursement des sommes versées par les contribuables.

Le PD s'est dit favorable à la réduction de la taxe, mais pas à sa suppression totale pour des raisons budgétaires. La suppression de cette taxe et le remboursement des sommes versées l'an dernier constitueraient un "trou" de huit milliards d'euros dans le budget de l'Etat.

Malgré ce différend de taille, Silvio Berlusconi se montre optimiste sur la formation d'un gouvernement. "Les choses se mettent bien en place", a déclaré "Il Cavaliere" à La Stampa.

Enrico Letta a fait savoir que ses priorités allaient à la création d'emplois et à l'aide aux PME, ainsi qu'à la réforme des institutions, et notamment du code électoral.

C'est en effet l'égalité des prérogatives accordée aux deux chambres du Parlement qui a conduit à l'impasse actuelle.

UN POINT COMMUN

Silvio Berlusconi, 76 ans, et Enrico Letta, 46 ans, ont au moins un point commun : ils veulent tous deux mettre de côté l'obsession de l'Union européenne pour l'austérité pour privilégier des mesures de relance de la croissance économique et de l'investissement.

Une fois un consensus trouvé sur les grands principes, le chef du gouvernement désigné et les dirigeants du PDL vont devoir se mettre d'accord sur les noms des principaux ministres. Le PDL souhaite qu'à la différence du précédent gouvernement, la nouvelle équipe soit essentiellement composée de politiques et non de techniciens.

Silvio Berlusconi aimerait que le ministère de l'Economie soit confié à Renato Brunetta, actuel chef du groupe PDL à la Chambre des députés et ancien professeur d'économie réputé pour sa pugnacité, alors que circulait le nom de Fabrizio Saccomanni, directeur général de la Banque d'Italie.

Parmi les autres candidats possibles figurent l'ancien président du Conseil Giuliano Amato. Mario Monti ou l'ancien président du Conseil Massimo D'Alema seraient quant à eux pressentis pour les Affaires étrangères.

En ce qui le concerne personnellement, "Il Cavaliere" demande à faire partie du groupe qui sera chargé des réformes institutionnelles. Il souhaite notamment que le chef de l'Etat soit élu au suffrage universel direct, à l'instar de ce qui se passe en France depuis 1962.

Reste aussi à régler le problème du PD, très divisé et dont de nombreux membres ont du mal à accepter de devoir s'allier avec Silvio Berlusconi, toujours poursuivi par la justice pour fraude fiscale et incitation à la prostitution de mineure.

Il se murmure que certains jeunes "rebelles" du PD pourraient refuser de voter la confiance au gouvernement Letta quand il se présentera devant le Parlement.

Le Mouvement 5 Etoiles (M5S) de Beppe Grillo et La Ligue du Nord fédéraliste, qui était alliée au PDL lors de la dernière campagne, ont d'ores et déjà décidé de siéger dans l'opposition et de se prononcer au cas par cas sur les réformes qui seront proposées.

Le Sel (Gauche, écologie, liberté), qui s'était allié au PD pour les élections de février, entend lui aussi rester dans l'opposition. (Danielle Rouquié et Bertrand Boucey pour le service français)