* L'écologie est une priorité, assure Ayrault

* Position délicate pour les Verts

* Batho s'exprimera jeudi sur son limogeage (Actualisé avec Placé, sondage)

PARIS, 3 juillet (Reuters) - Le gouvernement français a justifié mercredi sa décision de limoger sa ministre de l'Ecologie Delphine Batho par le respect de la solidarité gouvernementale, qui place les écologistes du gouvernement dans une situation de plus en plus inconfortable.

Europe Ecologie-Les Verts (EELV), qui compte deux ministres au sein du gouvernement, a exclu mardi soir tout départ du gouvernement dans l'immédiat, tout en prévenant que ce dernier serait jugé sur le budget 2014 à la rentrée.

La tension, déjà vive au sein de la majorité, est montée d'un cran mardi avec la décision du président français de mettre fin aux fonctions de Delphine Batho, qui avait critiqué le "mauvais budget" accordé à son ministère.

Selon un sondage Harris interactive pour RTL, 59% des Français n'approuvent pas l'éviction de Delphine Batho, tandis que 41% des sondés l'approuvent.

L'ex-ministre a annoncé mercredi, lors de la cérémonie de passation de pouvoir à son successeur Philippe Martin, qu'elle dirait tout sur son limogeage jeudi lors d'une conférence de presse.

Lors du conseil des ministres, le chef de l'Etat a assuré qu'il ne s'agissait "ni d'une question de personne, ni d'une question de sujet", a déclaré la porte-parole du gouvernement Najat Vallaud-Belkacem à la presse.

"Delphine Batho a manqué à un principe majeur de solidarité et de cohésion gouvernementale", a-t-elle ajouté. "Le débat peut avoir lieu à l'intérieur mais une fois arbitré, les ministres sont collectivement comptables des décisions prises."

Jean-Marc Ayrault, qui a pris l'initiative de demander le départ de sa ministre à François Hollande, s'en est expliqué.

"S'agissant du gouvernement de la France, l'acte budgétaire est un acte central et si une ministre (...) dit activement que le budget qui a été préparé avec elle n'est pas un bon budget, qu'elle le dit publiquement, il y a un problème politique, un problème de cohérence, un problème de solidarité gouvernementale", a expliqué le Premier ministre à l'Assemblée.

UN AVERTISSEMENT AUX TRUBLIONS

Le ministre du Budget Bernard Cazeneuve, qui a mis en avant la nécessité de faire "bloc face aux épreuves" dans la situation difficile que connaît la France, a expliqué que ce limogeage avait valeur d'avertissement pour l'ensemble du gouvernement.

Inattendu, le départ de Delphine Batho a été perçu comme un "signal d'alarme" par les écologistes, dont certains ont exprimé des inquiétudes face au recul des priorités gouvernementales en matière d'écologie et d'environnement.

Jean-Marc Ayrault a affirmé que l'écologie restait une priorité du gouvernement, comme le prouveront le budget 2014, dans lequel il y aura une réforme de la fiscalité des carburants, et les investissements d'avenir qui seront annoncés la semaine prochaine, notamment dans l'environnement.

"Les engagements du président de la République seront tenus, malgré les contraintes budgétaires", a-t-il dit à l'Assemblée.

Le nouveau ministre de l'Ecologie, Philippe Martin, jugé par nombre d'écologistes compétent et énergique, a promis mercredi des "actes" lors de la cérémonie de passation de pouvoir.

"Mon travail sera de faire que l'écologie soit effectivement à la place qui lui revient dans la politique du gouvernement, c'est-à-dire une place de choix", a-t-il dit, tout en soulignant qu'"une ambition écologique" ne se résumait "pas à un budget".

DES ACTES

Avec les écologistes, "nous devons travailler ensemble à faire bouger les choses", a-t-il dit. "Je crois que les écologistes ont demandé des actes, il faudra qu'il y a des actes."

Le ministre au Développement Pascal Canfin (EELV) a lui aussi prévenu que les Verts pourraient quitter le gouvernement si aucun acte n'était posé en faveur de la transition écologique.

"Il y a devant nous des rendez-vous déterminants et si ces rendez-vous étaient ratés à ce moment là nous en tirerons toutes les conséquences", a-t-il dit sur France Info.

Jean-Vincent Placé, président du groupe écologiste au sénat, a dit sa conviction que le budget de l'écologie finirait par augmenter, affirmant que dans le cas contraire EELV quitterait "évidemment" le gouvernement.

"J'ai la prétention de penser que ça va augmenter. Donc, ça va augmenter et nous voterons ce budget. Si ça reste en l'état nous ne voterons pas le budget", a-t-il dit lors de l'émission "l'Invité" de LCI/Les Indés Radios/ Metronews.

Les deux ministres écologistes sont dans une situation très difficile, entre les gros bataillons socialistes qui donnent parfois l'impression que les règles environnementales sont les ennemies de l'emploi et les parlementaires d'EELV qui tirent à boulets rouges contre la politique du gouvernement.

La proximité des élections municipales de 2014, où les écologistes n'ont d'espoir d'obtenir des élus que par un accord avec le PS, leur complique encore la tâche.

L'ancien dirigeant d'EELV Daniel Cohn-Bendit, qui estime que François Hollande a eu tort de poser un "acte d'autorité" en limogeant sa ministre pour un commentaire selon lui "pas grave", a appelé sur Europe 1 les Verts à prendre une décision.

(Marine Pennetier, avec Jean-Baptiste Vey, édité par Yves Clarisse)