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AMIENS, Somme, 4 janvier (Reuters) - Le parquet d'Amiens (Somme) a requis mercredi une amende de 1.000 à 1.500 euros contre le syndicaliste de la CGT Xavier Mathieu, ancien leader des grévistes de l'usine Continental poursuivi pour avoir refusé l'inscription de son empreinte génétique dans un fichier national.

L'audience s'est tenue mercredi après-midi en présence de nombreux syndicalistes et de quatre candidats de gauche à la présidentielle, venus soutenir celui qui se présente comme un symbole de la lutte des salariés pour leurs emplois.

La cour a mis sa décision en délibéré au 13 février.

Xavier Mathieu, leader syndical des salariés de Continental de l'usine de Clairoix dans l'Oise, fermée en 2010 avec la suppression de 1.100 postes, a déjà été condamné à 4.000 euros d'amende pour le saccage de la sous-préfecture de Compiègne.

C'est dans ce cadre, comme le prévoit la loi, que le prélèvement de son empreinte génétique est requise pour intégration dans le Fichier national qui est censé regrouper ces données pour tous les condamnés.

Xavier Mathieu, proche de la gauche radicale, estime cependant que son cas est particulier puisque le délit commis l'a été dans le cadre d'une action syndicale. Il refuse donc ce prélèvement qui le mettrait, à ses yeux, sur le même plan que des criminels.

Il a été relaxé en première instance pour ce refus mais le parquet avait fait appel. Le personnage de Xavier Mathieu est controversé à gauche depuis qu'en 2009 il a qualifié de "racaille" le patron de son propre syndicat, Bernard Thibault, coupable à ses yeux d'être trop enclin au compromis.

Plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées devant la cour, dont Philippe Poutou, candidat du Nouveau parti anticapitaliste à la présidentielle.

Ce dernier a lancé un appel à "défendre les droits des travailleurs dans le pays". Nathalie Arthaud, candidate de Lutte Ouvrière, a vu dans ce procès "une manière de faire en sorte que les travailleurs et les syndicalistes ne se défendent pas".

Jean-Luc Mélenchon, candidat du Front de gauche, s'est inquiété de ce qu'il voit comme des arrières-pensées liées du procès.

"Si on le condamne, c'est pour tenter de casser un syndicaliste, c'est qu'on estime qu'un syndicaliste qui exerce son action syndicale doit être fiché, c'est grave, c'est la liberté syndicale qui aura fait un bond en arrière", a-t-il dit à la presse.

La candidate d'Europe écologie-Les Verts Eva Joly a affirmé que si elle était élue, elle modifierait la loi contre le fichage ADN.

"Cette loi est trop large, elle avait été conçue pour des délits plus graves, pour des crimes, pas pour des actions syndicales. Les suspects de viols ont leur place dans ce fichier ADN, mais la France est allé beaucoup trop loin et dans le cas présent, le parquet aux ordres a fait appel", a-t-elle dit aux journalistes.

Le candidat PS François Hollande, en déplacement au même moment à Bordeaux, n'était pas présent et s'est fait représenter par Laurence Rossignol, sénatrice de l'Oise. Des syndicalistes présents ont contesté cette absence qu'ils interprètent comme un défaut de soutien.

Le PS a publié dans la soirée un communiqué. "L'appel du ministère public a relevé d'une volonté politique de criminalisation des luttes sociales et manifesté un véritable acharnement à l'égard de Xavier Mathieu. La direction de Continental, quant à elle, n'aura jamais eu à rendre des comptes", lit-on.

"Le Parti socialiste s'engage en 2012 à respecter, à la lettre, l'esprit de la loi sur le fichier génétique, qui est un outil pour prévenir les atteintes aux personnes et aucunement pour la mise en place d'un fichage syndical", ajoute-t-il. (Pierre Savary, Thierry Lévêque)