(Actualisé avec Me Delarue)

LYON, 22 novembre (Reuters) - La cour d'assises du Rhône a reconnu vendredi soir Stéphane Moitoiret, 44 ans, meurtrier du petit Valentin, responsable de ses actes et l'a condamné à trente ans de réclusion avec rétention de sécurité des deux tiers.

Sa compagne, Noëlla Hégo, 53 ans, mystique délirante, a en revanche été acquittée du chef de complicité. Elle a toutefois été reconnue coupable de tentative d'enlèvement d'enfant dans une autre affaire remontant à 2006 et condamnée à cinq ans dont un avec sursis. Elle devrait être rapidement libérée.

La cour d'assises du Rhône, qui jugeait en appel ces deux marginaux a allégé le verdict prononcé en décembre 2011 par la cour d'assises de Bourg-en-Bresse qui avait condamné à perpétuité Stéphane Moitoiret seul.

Jeudi, Jean-Paul Gandolière, l'avocat général de la cour d'assises du Rhône, qui avait déjà requis en décembre 2011 à Bourg-en-Bresse avait demandé à la cour de reconnaître les deux accusés responsables de leurs actes et de les condamner respectivement à 30 et 18 ans de réclusion.

Au terme de deux semaines de procès qui ont vu défiler une dizaine d'experts psychiatres appelés à se déterminer sur la santé mentale des deux routards, les jurés ont penché en faveur de "l'altération" du discernement de Stéphane Moitoiret, ce qui a permis de lui infliger une condamnation pénale.

Ils n'ont manifestement pas été sensibles aux arguments d'une partie des psychiatres qui les ont décrits comme "un couple de deux grands malades mentaux".

Roksana Nassezadeh avait demandé l'acquittement de sa cliente Noëlla Hégo, considérant qu'elle n'avait en rien influencé le geste de son compagnon de route. Une position partagée par la plupart des psychiatres.

DÉNI MALGRÉ L'ADN

Les avocats de Stéphane Moitoiret, qui reconnaissent la culpabilité de leur client, ont tenté de convaincre les jurés que ce schizophrène serait moins nuisible pour la société dans un hôpital psychiatrique que derrière les barreaux d'une prison.

"En France, même avec une peine de sûreté on sort un jour de prison", a rappelé maître Hubert Delarue, "alors qu'on ne sort pas d'une UMD (Unité pour Malade Difficile), sauf pour y être enterré au cimetière".

"Le sort qu'on lui promet, nous, sera pire que celui que vous réclamez monsieur l'avocat général", a-t-il lancé en direction du parquet. "Personne, dans cet UMD, ne prendra le risque de le laisser sortir un jour".

Une façon de répondre à Gilbert Collard, avocat de Véronique Crémault, mère du petit Valentin, qui a rapporté ses craintes: "Elle a peur que s'il va à l'hôpital, un jour, les médecins considèrent qu'il est guéri et le libère".

Son confrère Franck Berthon a renchéri en rappelant le cas de ce détenu cannibale, également schizophrène, qui avait dévoré son voisin de cellule. "Vous êtes les otages d'une vengeance judiciaire parce qu'un jour un garde des sceaux a déclaré: "Même fou, il sera jugé", a renchéri maître Franck Berton.

Maître Hubert Delarue, l'un des avocats de Stéphane Moitoiret, a regretté hier soir ce verdict, considérant que l'on venait "à Lyon, de criminaliser la folie". "C'est un mauvais présage pour l'institution judiciaire" a-t-il commenté. Il a confié que son client, lui était "content, car la cour avait considéré qu'il n'était pas fou".

Il s'est également inquiété de la peine prononcée au regard de la dangerosité de Moitoiret: "Il ne lui reste qu'une dizaine d'année à purger avant de retrouver la liberté". Lui avait plaidé en faveur d'une hospitalisation en UMD.

Stéphane Moitoiret, qui nie avoir porté les coups mortels malgré les traces ADN qui l'accable, a indiqué avant que le cour ne se retire pour délibérer: "Quand quelqu'un doit mourir, on ne peut rien y faire".

Valentin Crémault, 11 ans, avait été retrouvé mort, dans une mare de sang, à côté de son vélo, dans la nuit du 28 juillet 2008. Les légistes avaient dans un premier temps pensé que l'enfant avait été attaqué par un animal.

Mais après les descriptions données par plusieurs témoins, des bandes de vidéo surveillance, et la découverte d'un ADN mêlé à celui de l'enfant, le couple de vagabonds avait été interpellé sur les routes d'Ardèche quelques jours après le drame.

(Catherine Lagrange, édité par Eric Faye)