* Sarkozy à quitte ou double à trois mois de la présidentielle

* Les syndicats, opposés à la "TVA sociale", s'interrogent

* Accord possible sur le chômage partiel et la formation

par Emmanuel Jarry et Yann Le Guernigou

PARIS, 18 janvier (Reuters) - Nicolas Sarkozy a réuni mercredi matin les partenaires sociaux pour tenter de rallier des soutiens à un train de mesures susceptibles d'enrayer la montée du chômage et de donner un peu d'oxygène à des entreprises françaises en mal de compétitivité.

A trois mois de l'élection présidentielle, le chef de l'Etat, à la traîne dans les sondages et fragilisé par la décision de l'agence Standard & Poor's de retirer à la France sa note souveraine "triple A", paraît ainsi jouer son va-tout.

Ce sommet social rebaptisé "sommet sur la crise" et organisé à la place du traditionnel conseil des ministres hebdomadaire, a débuté à 09h00 (08H00 GMT) et devrait durer trois heures.

Y participent les centrales syndicales CGT, FO, CFDT, CFTC et CFE-CGC et les organisations patronales Medef, CGPME et UPA, ainsi que les ministres concernés.

Les principaux syndicats de salariés ont d'ores et déjà fait connaître leur opposition à l'une des propositions de Nicolas Sarkozy - le transfert d'une partie des cotisations sociales patronales sur des mesures fiscales "anti-délocalisation", qui devrait prendre la forme d'une hausse de TVA.

Ils contestent également l'idée d'accords compétitivité-emploi qui permettraient à une entreprise en difficulté de négocier une nouvelle durée du travail, une baisse des salaires ou un panachage des deux.

SYNDICATS DUBITATIFS

Selon le ministre du Travail, un accord se dessinerait en revanche sur des mesures d'aide au chômage partiel pour éviter des licenciements et sur la formation des chômeurs.

"Ce sera un sommet pour prendre des décisions", a assuré mardi le ministre du Travail, Xavier Bertrand.

Christian Jacob, président du groupe UMP à l'Assemblée, a précisé que cela se traduiraitvraisemblablement par un collectif budgétaire en conseil des ministres début février et devant le Parlement fin février-début mars.

Les syndicats s'interrogent sur les desseins réels du chef de l'Etat et sur leur marge de manoeuvre lors d'un sommet dont la partition semble déjà partiellement écrite.

"J'ai 15 propositions mais qui sont des propositions concrètes en matière de formation, en matière de chômage, pour l'emploi, le chômage partiel", a déclaré le secrétaire général de Force ouvrière, Jean-Claude Mailly, à son arrivée.

"Pour le reste, on ne peut pas rentrer dans des logiques qui, selon moi, sont fausses économiquement et dangereuses socialement", a-t-il ajouté.

Pour Pierre Cahuc, professeur d'économie à l'Ecole Polytechnique, "c'est le scénario classique où (Nicolas Sarkozy) se précipite dans un arrangement de dernière minute sans prendre suffisamment de temps pour des consultations ou le suivi".

Le secrétaire général de la CGT, Bernard Thibault, a jugé impossible de "chambouler les mécanismes de financement de la Sécurité sociale en quelques jours, en quelques heures".

UNE HAUSSE LIMITÉE DE TVA ?

Nicolas Sarkozy a prévu de s'adresser fin janvier aux Français pour expliquer les décisions arrêtées.

Selon des sources gouvernementales, la hausse de TVA envisagée par le gouvernement en échange d'une réduction des cotisations sociales patronales sera en tout état de cause limitée pour éviter un impact néfaste sur la consommation, loin des demandes de baisse massive de charges du patronat.

Le quotidien économique Les Echos croit savoir que cette hausse de TVA serait limitée à deux points et ne porterait que sur le taux normal actuel de 19,6%.

Les quelque 12 milliards d'euros ainsi récoltés par l'Etat serviraient à réduire les charges patronales pour les salariés gagnant jusqu'à deux à 2,5 fois le smic, précise le journal.

Le secrétaire général de la CFDT, François Chérèque, est venu à l'Elysée avec une proposition de substitution : une baisse de 10 points des cotisations sociales couplée à une augmentation des salaires de 7% et à une hausse de la contribution sociale généralisée (CSG) de 7%.

La présidente du Medef, Laurence Parisot, prône pour sa part une hausse de la TVA épargnant les produits de première nécessité, compensée par une baisse des charges patronales et assortie d'une hausse de la CSG.

La question des moyens de Pôle Emploi, où les agents se plaignent de crouler sous les dossiers, devrait également être évoquée, ainsi que celle d'une augmentation de l'offre de logements et le projet, cher à Nicolas Sarkozy, de taxation des transactions financières.

Le gouvernement a tenté d'allumer par avance un contrefeu face aux critiques de l'opposition en brandissant le spectre d'un "coup d'assommoir fiscal" si la gauche revient au pouvoir en mai prochain, par la voix du ministre de la Recherche, Laurent Wauquiez dans une interview au Figaro. (Avec Sophie Louet, édité par Yves Clarisse)