PARIS, 29 janvier (Reuters) - L'importance de l'épargne réglementée en France et la gestion très politique de sa rémunération rendent les ressources des banques trop coûteuses et nuisent à la transmission de la politique monétaire de la Banque centrale européenne dans l'économie française, a estimé mardi Christian Noyer.

"Il est essentiel que les banques disposent de ressources bon marché pour pouvoir en faire bénéficier leurs emprunteurs, et ce encore plus dans la situation actuelle de reprise économique fragile", a déclaré le gouverneur de la Banque de France.

Christian Noyer, qui s'exprimait lors des rencontres parlementaires sur l'épargne, a souligné que, à 1,25%, le taux du livret A et du livret de développement durable se situait à un niveau "bien supérieur" à celui du principal taux directeur de la BCE, qui est de 0,25%.

"Ce taux détermine largement ceux des livrets librement rémunérés, pour des motifs commerciaux évidents", ce qui fait que son "niveau élevé contribue donc en réalité à renchérir une grande partie des ressources bancaires et, in fine, se répercute sur le coût du crédit", a-t-il ajouté.

Invoquant la préservation du pouvoir d'achat des épargnants, le ministre de l'Economie Pierre Moscovici vient de décider le maintien du taux du livret A à 1,25% lors de sa révision semestrielle, alors que la formule de son calcul, qui tient compte d'une inflation actuellement très faible, aurait dû conduire à l'abaisser à 0,75%. (voir )

Le gouverneur de la Banque de France avait lui recommandé qu'il soit fixé à 1,0%.

"Pour des raisons qui peuvent être parfaitement justifiables politiquement, nous avons un pays qui fait tout ce qu'il peut en ce moment pour empêcher la politique agressive de la BCE de se transmettre efficacement à l'économie française", a-t-il déploré.

Christian Noyer, qui est membre du conseil des gouverneurs de la BCE, a estimé que, dans le contexte français, la réflexion sur l'épargne devait notamment porter sur les moyens de "permettre une transmission normale" de cette politique.

Pour lui, ceci passe par une réduction des entraves que constituent "les réglementations étatiques" des taux d'intérêt, dont il s'est demandé en outre "si elles sont bien conformes aux règles de l'Union monétaire."

"Cela fonctionnera d'autant mieux qu'il y aura le minimum d'interférence d'autres autorités sur le jeu naturel des taux d'intérêt. Ce n'est pas la peine de pleurer pour que la Banque centrale fasse ceci et cela et ensuite créer des obstacles à la transmission de sa politique monétaire que certains disent accommodante et d'autres agressive", a-t-il encore dit. (Yann Le Guernigou, édité par Yves Clarisse)

Valeurs citées dans l'article : SOCIETE GENERALE, BNP PARIBAS, NATIXIS, CREDIT AGRICOLE