(Actualisé avec placement en détention §4)

par Shadia Nasralla

LONDRES/AMMAN, 7 juillet (Reuters) - La Grande-Bretagne a extradé dimanche le prédicateur islamiste Abou Qatada vers la Jordanie où il sera rejugé après avoir été condamné par contumace dans deux affaires de terrorisme.

Cette extradition de Qatada, qui avait demandé l'asile à la Grande-Bretagne il y a vingt ans, met fin à une procédure qui a duré huit années.

Un convoi de police a conduit peu après minuit le prédicateur jordanien d'origine palestinienne de la prison londonienne de Belmarsh, dans laquelle il était détenu, jusqu'à un aéroport militaire.

A son arrivée à Amman, Abou Qatada, dont le vrai nom est Omar Mahmoud Othman, a été emmené sous escorte jusqu'à un tribunal militaire où le procureur a ordonné son placement en détention pendant quinze jours à la prison de Mouakar, dans la banlieue de la capitale jordanienne.

"Il est de bonne humeur et nous espérons qu'il sera bientôt libéré sous caution", a déclaré le père du prédicateur devant le bâtiment du tribunal.

Les parlementaires britanniques ont salué le départ de Qatada qui, espèrent-ils, va mettre fin à une bataille juridique embarrassante pour les gouvernements successifs.

"Je suis absolument enchanté", a commenté le Premier ministre David Cameron. "C'est un problème qui me faisait bouillir les sangs.

"Cet homme n'avait aucun droit d'être dans notre pays, il était une menace pour notre pays. Cela a pris beaucoup de temps et cela a été très compliqué de l'extrader", a ajouté le chef du gouvernement britannique.

"PROCES EQUITABLE"

Le ministre jordanien d'Etat Mohammad al Momani a indiqué à Reuters que Qatada serait traité d'une manière équitable.

"Le droit jordanien garantit un procès équitable, le système judiciaire jordanien respecte les droits de l'homme", a-t-il dit.

Les autorités britanniques estimaient que l'islamiste radical, décrit un jour par un magistrat espagnol comme "le bras droit d'Oussama ben Laden en Europe", constituait une menace pour la sécurité nationale.

La justice avait à plusieurs reprises bloqué le processus d'extradition en estimant que Qatada ne bénéficierait pas d'un procès impartial en Jordanie et que des aveux pourraient lui être soutirés sous la torture.

Les organisations de défense des droits civiques ont critiqué le fait qu'il soit jugé devant un tribunal militaire.

Des prêches de Qatada avaient été retrouvés dans un appartement de Hambourg utilisé par plusieurs des terroristes qui avaient participé aux attentats du 11 septembre 2001.

Le prédicateur a effectué plusieurs séjours en prison depuis sa première arrestation en Grande-Bretagne en 2001. Il avait été à nouveau interné en mars pour avoir enfreint les règles de sa mise en liberté sous caution.

Qatada avait été condamné deux fois par contumace en Jordanie, en 1999 et en 2000, pour avoir encouragé des activistes dans leurs projets d'attentats à la bombe.

Les autorités jordaniennes demandaient depuis lors qu'il soit rejugé en conservant les mêmes chefs d'inculpation.

Abou Qatada a toujours nié les accusations.

Son extradition a été rendue possible par la ratification la semaine passée d'une convention entre Amman et Londres apportant aux juges britanniques les garanties qu'ils souhaitaient dans le déroulement du procès.

Les avocats représentant Qatada avaient indiqué en mai que le religieux quitterait volontairement la Grande-Bretagne une fois le traité d'extradition finalisé. (Avec William James et Suleiman Al Khalidi, Pierre Sérisier et Hélène Duvigneau pour le service français, édité par Guy Kerivel)