par Serajul Quadir et Nandita Bose

DACCA, 5 janvier (Reuters) - Les bureaux de vote ont ouvert dimanche au Bangladesh pour des élections législatives à haut risque boycottées par le principal parti de l'opposition et au terme d'une campagne violente qui a fait plus de 100 morts.

La Ligue Awami, au pouvoir, n'aura pas d'adversaire dans plus de la moitié des 300 circonscriptions en jeu, et s'oriente donc vers une victoire aisée.

Mais le fossé qui sépare le parti d'obédience socialiste de cheikh Hasina, Premier ministre sortant, et le Parti nationaliste du Bangladesh (BNP), le parti conservateur d'opposition de la bégum Khaleda Zia qui a préféré retirer ses candidats, sapera la légitimité du scrutin.

"Ces élections ne vont nullement contribuer à résoudre le blocage que nous observons depuis quelques mois", souligne Iftekhar Zaman, directeur pour le Bangladesh de Transparency International, l'ONG spécialisée dans la lutte contre la corruption.

"Le Parlement qui en émergera sera un Parlement sans opposition, et nous allons au devant d'une très grave crise de légitimité", ajoute-t-il.

Le BNP a appelé ses partisans à ne pas participer à des élections qu'il qualifie de farce.

Les risques de violences électorales devraient également dissuader nombre d'électeurs de se rendre aux urnes. Plus de 130 bureaux de vote ont été incendiés depuis vendredi et un agent électoral a été tué samedi dans le nord du pays.

La commission électorale a envoyé samedi des sms pour affirmer que la sécurité serait garantie et pour exhorter les électeurs inscrits à se mobiliser.

Des soldats sont déployés depuis le 26 décembre pour maintenir l'ordre.

PAS D'OBSERVATEURS EUROPÉENS OU DU COMMONWEALTH

Le BNP, dont nombre de cadres sont en prison ou en fuite, a décidé de boycotter les législatives pour dénoncer la décision de Sheikh Hasina de ne pas suivre la tradition qui voulait qu'un gouvernement apolitique de transition soit formé avant les élections.

L'exécution en décembre d'Abdul Quader Mollah, un chef islamiste proche du BNP condamné à mort pour des crimes commis en 1971 durant la guerre d'indépendance, a aussi contribué aux troubles.

L'Union européenne, qui absorbe 60% des exportations du secteur local de la confection et du textile, a refusé d'envoyer une mission d'observation électorale. Les Etats-Unis et le Commonwealth, qui regroupe 53 nations, d'anciennes colonies britanniques pour l'essentiel, ont fait de même.

Si l'issue des législatives ne fait aucun doute, l'avenir à moyen terme du Bangladesh et de ses 160 millions d'habitants semble beaucoup plus incertain.

La crise politique risque notamment de peser sur le secteur de la confection, qui représente 80% des exportations et un chiffre d'affaire annuel de 22 milliards de dollars. Il a déjà été malmené par une série de grèves dont une, toujours en cours, a été organisée à l'appel du BNP. (Jean-Philippe Lefief et Henri-Pierre André pour le service français)