* Un nouveau type de contrat proposé dans le rapport Berger-Lefebvre

* Pour inciter les plus aisés à investir dans les entreprises

* Avantage fiscal maintenu pour les nouveaux contrats et ceux en UC

* Une brèche dans la stabilité fiscale de l'assurance-vie

par Matthieu Protard

PARIS, 2 avril (Reuters) - La suppression d'avantages fiscaux associés à certains contrats d'assurance-vie, telle que préconisée mardi dans le rapport sur l'épargne financière remis au gouvernement, remettrait en cause l'un des piliers de l'assurance-vie française, à savoir la non-rétroactivité fiscale.

Dans leur rapport, les députés socialistes Karine Berger et Dominique Lefebvre proposent en effet pour les détenteurs de plus de 500.000 euros d'encours d'assurance-vie de réserver l'avantage fiscal à ceux qui choisiraient de basculer une partie de leur épargne vers un nouveau contrat "Euro-Croissance" destiné au financement des entreprises.

L'avantage fiscal, au-dessus de 500.000 euros d'assurance-vie, serait maintenu pour les contrats en unités de compte, réputés plus risqués que les contrats en euro. (voir )

"Il y a une règle en matière de fiscalité de l'assurance-vie, c'est que logiquement il n'y a pas d'effet rétroactif", remarque Philippe Crevel, secrétaire général du Cercle des épargnants.

"A la lecture du rapport, ce n'est pas évident. On risque de mettre un terme à une règle qui s'est toujours appliquée sur l'assurance-vie, c'est la non-rétroactivité fiscale", poursuit l'économiste. "Il y a là un doute qui pourrait être un gros coup de canif dans le principe de l'assurance-vie en France."

Sans le dire explicitement, le rapport Berger-Lefebvre aurait pour conséquence de priver les plus gros contrats d'assurance en euro, ceux ayant plus de 500.000 euros d'encours, de leur avantage fiscal, à moins qu'une partie de l'épargne soit placée sur des supports d'investissement de plus longue durée ou plus risqués pour soutenir le financement des entreprises.

Selon le rapport, les contrats de plus de 500.000 euros ne représentent que 1% des ménages français les plus aisés, mais un quart des encours de l'assurance-vie.

"LE PARI N'EST PAS GAGNÉ"

"Les gros contrats seraient plus lourdement frappés s'ils ne s'investissaient pas dans les nouveaux fonds Euro-Croissance", relève Philippe Crevel.

"Le bénéfice d'un régime fiscal identique pour des contrats en euro (...) comme pour des contrats en unités de compte (...)ne paraît en effet pas justifié pour les plus hauts patrimoines au regard de l'objectif d'un financement répondant aux besoins de l'économie productive comme à celui de l'équité fiscale", soulignent d'ailleurs les deux députés dans leur rapport.

Le contexte de déficit budgétaire en France a aussi poussé les deux élus à privilégier la voie de la pénalité fiscale pour encourager l'épargne vers les entreprises, au détriment de l'incitation fiscale.

"Il serait au demeurant tout à fait inapproprié, dans le contexte temporaire de croissance faible (...) en France et en Europe et eu égard à la situation des finances publiques, de peser davantage sur la demande intérieure en développant de nouveaux produits et de nouvelles incitations fiscales", soulignent ainsi Karine Berger et Dominique Lefebvre.

Le Cercle des épargnants rappellent toutefois qu'outre l'argument fiscal, les assureurs devront également proposer des rendements plus attractifs pour inciter les épargnants les plus aisés à investir davantage dans les entreprises.

"L'épargnant est assez conservateur et ce n'est pas parce qu'ils ont les plus gros contrats (d'assurance-vie, ndlr) qu'ils sont plus audacieux que les petits contrats", note Philippe Crevel.

"Souvent, le titulaire d'un gros contrat n'est pas forcément un aventurier (...) Le pari n'est pas gagné", ajoute l'économiste. "Il faut que le rendement à proposer par les assureurs soit plus attractif." (Edité par Dominique Rodriguez)