par Thomas Atkins

FRANCFORT, 26 avril (Reuters) - Vendre Postbank et réduire la voilure de la banque d'investissement, deux nouveaux objectifs stratégiques dévoilés vendredi soir, ne sera pas chose aisée pour Deutsche Bank, estiment les analystes.

Même si les investisseurs ne connaîtront pas en détail ce nouveau plan stratégique avant lundi à 6h00 GMT, l'ampleur du défi est d'ores et déjà évidente.

La première banque allemande a tardé à se restructurer alors que des concurrentes européennes telles que Barclays et Crédit Suisse ont déjà pratiqué des coupes claires dans leurs effectifs et leurs actifs il y a des années.

Il sera tout particulièrement difficile pour Deutsche Bank de vendre Postbank sans faire de pertes. La banque veut ramener sa participation de 94% à moins de 50% en vendant des titres sur le marché puis se désengager totalement à moyen terme, a dit samedi une source proche du dossier.

Deutsche Bank doit également compter avec l'Etat allemand qui ne veut en aucun cas entendre parler de licenciements massifs chez Postbank. "Deutsche a là une responsabilité sociale et politique qui dépasse ses intérêts économiques", a dit à Reuters Carsten Schneider, expert financier du Parti social-démocrate SPD.

Postbank pourrait rapporter près de 3,6 milliards d'euros si elle est vendue 0,8 fois sa valeur comptable, selon des calculs d'analystes. Cela veut dire une forte perte pour Deutsche Bank à moins qu'elle trouve un acheteur stratégique disposé à verser une prime.

Le choix de ne se séparer que de Postbank est une concession aux agences de notation, qui craignaient qu'une sortie totale de la banque de détail au profit de la banque d'investissement n'aiguise le profil de risque. La banque répond aussi, ce faisant, aux préoccupations de l'Etat allemand, qui redoutait qu'elle perde ses attaches locales.

150-200 MILLIARDS D'EUROS D'ACTIFS RETRANCHES

Deutsche Bank a racheté Postbank par étapes à partir de 2008 pour six milliards d'euros. Postbank sert 14 millions de clients à partir de 1.100 succursales intégrées au réseau de la Poste. Deutsche Bank pour sa part a une clientèle de 8,5 millions de particuliers répartis sur 730 agences à son nom.

"Avec des syndicats qui veulent 5% d'augmentation des salaires et la sécurité de l'emploi, il n'est pas du tout évident que Deutsche Bank puisse accélérer les choses", énonce l'analyste Huw van Steenis (Morgan Stanley).

Citant des sources financières, l'hebdomadaire Welt am Sonntag écrit dimanche que Deutsche Bank conservera 500 agences environ en Allemagne, ainsi que ses succursales en Italie et en Espagne. La banque compte 830 succursales et cinq millions de clients en dehors de l'Allemagne.

Omar Fall, analyste de Jefferies, pense que l'établissement "réduira l'étendue de ses opérations de détail en Europe, de préférence à zéro, et allègera ce qui restera de ses opérations de détail en Allemagne".

La division banque de détail internationale a contribué au bénéfice imposable de 2014 du groupe bancaire à hauteur de 753 millions d'euros, selon JPMorgan. Citibank calcule que Deutsche Bank pourrait vendre cette division pour un petit peu plus de 2,8 milliards d'euros.

Il ne sera pas plus facile de réduire les actifs de l'activité banque d'investissement de 150 à 200 milliards d'euros, une somme avancée par les analystes et également par Welt am Sonntag. Cela dit, une telle initiative doperait le ratio des fonds propres à l'actif, une mesure de la stabilité financière qui prend une importance croissante aux yeux des autorités de régulation.

La banque a déjà allégé certaines activités comme le papier commercial aux Etats-Unis et les swaps de défaut de crédit (CDS). En finir avec d'autres segments comme les prises en pension à long terme et les swaps de taux pourrait néanmoins se révéler coûteux.

"Déterminer dans quelle proportion elle va réduire la banque d'investissement et de quels marchés elle va sortir, voilà qui est primordial", observe l'analyste Dirk Becker (Kepler), estimant qu'elle doit d'une manière générale couper les ponts avec toute activité qui génère trop peu de marges pour le coût du capital engagé. (Avec Kathrin Jones, Matthias Sobolewski, Markus Wacket et Andreas Kroener, Wilfrid Exbrayat pour le service français)