* L'UMP plongée dans une crise financière aiguë

* Sarkozy démissionne du Conseil constitutionnel

* Il dit vouloir retrouver sa liberté de parole (Actualisé avec avocat de Sarkozy)

PARIS, 4 juillet (Reuters) - Nicolas Sarkozy a démissionné jeudi du Conseil constitutionnel après le rejet par cette institution de ses comptes de campagne pour l'élection présidentielle de 2012, une décision qui plonge l'UMP dans une crise financière aigüe.

Dans un communiqué, l'ancien président, dont les proches affirment qu'il montre de plus en plus sa volonté de revenir en politique, précise qu'il entend retrouver sa liberté de parole.

"Devant la gravité de la situation et les conséquences qui en résultent pour l'opposition et pour la démocratie, Nicolas Sarkozy démissionne immédiatement du Conseil constitutionnel afin de retrouver sa liberté de parole", explique-t-il.

Son avocat, Philippe Blanchetier, a déclaré sur BFM TV que la décision du Conseil constitutionnel ouvrait pour l'ancien président une séquence qui devrait trouver une traduction "peut-être en des termes politiques plus que juridiques".

"Je pense qu'il s'agit pour lui de donner un élan politique à cette décision", a-t-il déclaré.

La décision du Conseil constitutionnel complique la donne pour le parti de l'ancien président qui sera privé d'une subvention de 11 millions d'euros alors que ses comptes sont déjà minés par la défaite aux élections législatives de 2012.

Le président de l'UMP, Jean-François Copé, a annoncé dans qu'il lançait une souscription pour combler le manque à gagner et qu'il réunirait la semaine prochaine le bureau politique afin d'examiner "toutes les conséquences" de cette décision.

"J'entends certains commencer à évoquer l'idée que l'UMP, étranglée financièrement, ne pourrait plus continuer à faire entendre sa voix au service des Français, qu'elle ne pourrait plus dénoncer la politique de la gauche, qui détient tous les pouvoirs, qu'elle ne pourrait plus proposer un chemin d'espérance pour la France", a-t-il dit devant la presse.

DÉPASSEMENT DU PLAFOND

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) avait invalidé en décembre dernier les comptes de campagne de l'ancien chef de l'état pour l'élection présidentielle de 2012, estimant qu'il avait dépassé le plafond autorisé de plus de 300.000 euros.

Elle jugeait que les dépenses liées à certains déplacements présidentiels devaient être imputées au candidat.

Nicolas Sarkozy avait déclaré pour 21.339.664 euros de dépenses, la commission comptabilisait 22.872.615 euros.

Le Conseil constitutionnel, qui a rééxaminé les comptes, a jugé que le montant des dépenses électorales de Nicolas Sarkozy "excède de 466.118 euros, soit 2,1%, le plafond autorisé".

Dans un communiqué, il déclare que "c'est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne de M. Sarkozy".

Pour les "sages", sept déplacements présidentiels peuvent être regardées comme liés à l'exercice du mandat présidentiel, notamment des cérémonies de voeux et des inaugurations.

En revanche, il a jugé qu'il n'en allait "manifestement pas de même" de la réunion publique organisée à Toulon le 1er décembre 2011, "compte tenu de l'implication de l'UMP dans cette manifestation."

Saisi le 10 janvier par Nicolas Sarkozy, qui contestait le chiffrage de la CNCCFP, le Conseil constitutionnel, juge suprême de l'élection présidentielle, crée un précédent sous la Ve République en rejetant les comptes de l'ex-président.

Membre de droit jusqu'alors du Conseil constitutionnel, Nicolas Sarkozy n'a pas participé au délibéré sur ce dossier.

APPELS A DES REGLES CLAIRES

La commission des comptes de campagne avait réintégré des dépenses antérieures au 15 février 2012, jour de la déclaration de candidature de Nicolas Sarkozy, ce qui entraînait un dépassement du plafond autorisé pour les candidats du second tour - 22.509.000 euros (décret novembre 2011)- et donc un rejet de ses comptes.

Le rejet prive l'UMP, qui avait avancé les fonds, de la subvention de quelque 11 millions d'euros de l'Etat au titre du remboursement des frais de campagne à hauteur de 47,5% des frais engagés, soit 10.691.775 euros en vertu de la loi organique de février 2012.

Pour Bruno Le Roux, président du groupe PS de l'Assemblée, les rejets "qu'il y a eu qui ont été successifs ont été des rejets en fonction du droit et en fonction de la législation en vigueur."

"Il y avait des comptes truqués, il y a des comptes rejetés et donc ceux qui disent le droit en matière de comptes de campagne, ceux qui vérifient, sont tous arrivés à la même conclusion : les comptes n'étaient pas valides", a-t-il dit à la presse.

Jean-Christophe Lagarde, porte-parole du groupe UDI de l'Assemblée, a estimé que cette décision posait un problème institutionnel.

"Il faut que la règle soit clairement établie. Un président de la République exerce ses fonctions jusqu'au dernier jour et même après qu'il a été battu, et donc il faut qu'il nous dise ce qui est de l'ordre de la campagne et de l'ordre de l'exercice de son mandat", a-t-il dit à des journalistes. (Gérard Bon, avec Emile Picy, édité par Yves Clarisse)