"Un véritable camouflet pour Air France-KLM ! D’après La Tribune, la France aurait finalement cédé aux demandes insistantes des compagnies émiraties d’un plus grand accès à l’aéroport de Roissy Charles De Gaulle. Emirates et Etihad pourront progressivement obtenir jusqu’à quatre vols de plus par semaine contre 14 actuellement (ou très prochainement dans le cas d’Etihad). Air France-KLM aura pesé de tout son poids auprès des administrations et du gouvernement pour repousser les revendications de ces compagnies, considérées comme de redoutables concurrents.

Emirates et Etihad sont déjà les premières compagnies étrangères en termes de trafic passagers à relier Roissy et le grand Est. L’enjeu est immense parce qu’il s’agit de relier le hub de Roissy et donc ses multiples liaisons européennes à la zone Asie-Océanie. Or, les compagnies émiraties bénéficient d’un avantage comparatif par rapport à Air France. Le modèle industriel d’Emirates et Etihad repose sur la position géostratégique des Emirats Arabes Unis à mi-chemin entre l’Occident et l’Asie-Océanie. Ces compagnies ont pu constituer un catalogue de ligne particulièrement judicieux grâce aux multiples correspondances et escales possibles. Pour renforcer leur offensive commerciale contre les compagnies européennes, Etihad envisage même d’attaquer le marché transatlantique, chasse gardée de British Airways, et dans une moindre mesure d’Air France-KLM via son alliance Skyteam (Delta Airlines), en s’intéressant au dossier Virgin Atlantic. Etihad pourrait alors truster les lignes transatlantiques jusqu’en Asie, grâce à son réseau d’aéroports.

Quand l'Elysée s'en mêle...

Pour Air France-KLM, perdre des parts de marchés sur des lignes long-courriers est un coup porté à ses lignes les plus rentables. Elles le sont d’autant plus que le marché domestique des courts et moyens-courriers est rogné par les compagnies low cost. Les experts estiment que sous 25% de parts de marché, Air France-KLM n’a plus intérêt à se maintenir sur une ligne long-courrier. Pas étonnant qu’Air France-KLM ait alors obtenu du ministère des Transports français qu’il prenne son parti. Mais les Emiraties ne renoncent pas, et l’affaire remonte jusqu’à l’Elysée.

A la présidence, on perçoit très rapidement les enjeux de cette affaire pour les intérêts économiques de la France, et les Emirats Arabes Unis n’hésitent pas à faire pression. D’un côté, Etihad et Emirates menacent d’annuler des commandes d’A380 arguant que sans dessertes, ces avions ne leur sont d’aucune utilité. D’autre part, le gouvernement Emiratie doit statuer sur un contrat d’achat de Rafales. Pour Paris, la vente de Rafales figure en tête des priorités. L’avion de combat multimission de Dassault n’a encore jamais été exporté, et un échec commercial serait vécu comme un handicap d’un point de vue stratégique et militaire. Après le recul du Brésil sur la vente de Rafales, le symbole est trop grand pour prendre le risque de perdre le contrat Emiratie. Il faut dire que le contrat est absolument immense. Les Emirats Arabes Unis pourraient acheter jusqu’à 60 Rafales pour 8 milliards d’euros.

Air France-KLM ne cache pas son exaspération et accuse les compagnies dites du «Golfe» de concurrence déloyale, car financées par les fonds pétroliers de leurs Etats actionnaires. Une façon de dire que si Etihad et Emirates sont soutenues par leur gouvernement, on ne peut pas en dire autant pour la compagnie nationale française…"