(Actualisé §8 avec déclaration sur fin du rachat d'actifs)

SAN DIEGO, 4 janvier (Reuters) - Les banques centrales ont sacrifié une partie de leur indépendance en s'engageant dans des politiques quasi-budgétaires pour tenter de réparer les dégâts causés par la crise financière mondiale, a estimé vendredi un haut responsable de la Réserve fédérale américaine en visant notamment la Banque centrale européenne (BCE).

James Bullard, le président de la Fed de Saint-Louis, a jugé que le programme d'achats d'obligations d'Etat de la BCE (les "opérations monétaires sur titres" ou OMT) constituait une "budgétisation" de la politique monétaire et qu'il avait affaibli la capacité de riposte de la BCE à la récession en Europe.

"Pourquoi ? A tous points de vue, le processus de politique monétaire a été handicapé par des désaccords politiques sur les OMT et d'autres programmes", a-t-il dit dans un discours lors d'une réunion de l'American Economic Association consacrée à l'indépendance des banques centrales.

Les OMT, dont la BCE a annoncé les modalités en septembre mais qu'elle n'a pas encore mis en oeuvre car elles supposent une demande formelle de la part d'un Etat, prévoient des achats potentiellement illimités d'obligations souveraines pour faire baisser les coûts de financement des pays en difficulté.

La Fed a elle aussi été accusée de s'engager sur le terrain de la politique budgétaire, censée être l'apanage du pouvoir politique aux Etats-Unis, après le lancement de plusieurs programmes d'achats massifs d'obligations et de titres sur les marchés financiers.

Pour James Bullard, l'abandon par les banques centrales des seules politiques fondées sur des règles strictes et leur implication dans des initiatives sortant du cadre traditionnel de leur mandat a conduit à une "politisation rampante" du rôle de ces institutions, avec à la clé des résultats économiques décevants.

"Les performances macroéconomiques des pays dont les banques centrales sont politisées ont historiquement été faibles", a-t-il dit.

Les détracteurs de la politique actuelle d'"assouplissement quantitatif" (QE) de la Fed américaine craignent de voir ses programmes d'achats d'actifs financiers favoriser la résurgence de l'inflation, qui serait ensuite très difficile à juguler.

James Bullard a affirmé vendredi que la Fed pourrait mettre fin à son programme d'achats d'actifs avant la fin de 2013, si le taux de chômage américain, de 7,8% en décembre, baissait légèrement, "un peu au-dessus de 7%".

La Fed a entériné le mois dernier le maintien de programmes de rachats de titres au rythme de 85 milliards de dollars (65 milliards d'euros) par mois tant que les perspectives du marché du travail aux Etats-Unis ne seront pas nettement meilleures.

Elle s'est aussi engagée à maintenir des taux d'intérêt quasi-nuls jusqu'à ce que le taux de chômage soit ramené à 6,5%, à condition que les perspectives d'inflation restent contenues. (Alister Bull et Ann Saphir, Marc Angrand et Julien Dury pour le service français)