Deux jours après l'accord à l'Organisation mondiale du commerce (OMC), les ministres du Commerce de 12 pays ont engagé lundi des discussions à huis-clos à Singapour sur le Partenariat trans-Pacifique (TPP).

Un accord né de ces pourparlers pourrait créer une zone de libre-échange s'étendant du Viêt-nam au Chili en passant par le Japon, regroupant 800 millions de personnes et près de 40% de l'économie mondiale.

Plus ambitieux que les accords douaniers existants, il pourrait instaurer de nouvelles règles dans des domaines aussi sensibles que les appels d'offres publics ou la capacité des entreprises à engager des actions en justice contre les Etats.

Une telle issue semblait très lointaine il y a quelques mois seulement mais les Etats-Unis, promoteurs du projet, ont fait le forcing, avec succès: le ministre japonais du Commerce, Yasutoshi Nishimura, a déclaré lundi à des journalistes que des progrès avaient été réalisés lors d'un dîner de travail dimanche et des observateurs expliquent que la réunion ministérielle de l'OMC à Bali la semaine dernière a permis d'avancer aussi sur le TPP.

"J'aimerais continuer à progresser vers un accord d'ici la fin de l'année", a dit Yasutoshi Nishimura, ajoutant qu'il aurait ce lundi des discussions bilatérales avec la délégation américaine.

Les pourparlers de Singapour doivent prendre fin mardi, un délai trop court pour boucler un compromis, mais quelques mois pourraient permettre d'y parvenir, même si de nombreuses questions techniques n'ont pas encore trouvé de réponse.

CHINE ET CORÉE POURRAIENT REJOINDRE LE TPP

L'un des points d'achoppement des négociations tient à la volonté du Japon d'exempter de l'accord tarifaire cinq produits agricoles "sensibles", le riz, le blé, le boeuf, les produits laitiers et le sucre.

Aucun projet d'accord n'a jamais été rendu public et la publication le mois dernier par l'organisation indépendante Wikileaks d'un chapitre consacré à la propriété intellectuelle a révélé de nombreux points de divergences entre les différents pays.

Mais certains observateurs assurent que les discussions permettront de trouver un terrain d'entente.

"Nous ne sommes pas en terrain rationnel, nous sommes en terrain politique et cet accord concerne de plus en plus la politique étrangère et les alliances stratégiques, donc la recherche des compromis les moins mauvais possibles pour parvenir à un accord final", explique Jane Kelsey, professeur de droit à l'Université d'Auckland.

Si un accord est bouclé dans quelques mois seulement, il faudra encore attendre un certain temps avant qu'il entre en vigueur. Notamment parce que l'administration américaine risque de se heurter à l'opposition d'une partie du Congrès.

"Dans le meilleur des cas, ce serait le 1er juillet 2015, et une entrée en vigueur le 1er janvier 2016 est plus probable", estime Deborah Elms, de la Fondation Temasek pour le commerce et les négociations à Singapour.

L'accord pourrait parallèlement être étendu à des pays qui n'étaient pas impliqués au départ: le mois dernier, la Corée du Sud a déclaré qu'elle envisageait de se joindre aux discussions et il n'est pas exclu que la Chine lui emboîte le pas.

Les pays déjà engagés dans les négociations sont les Etats-Unis, le Canada, le Japon, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, Singapour, la Malaisie, le sultanat de Bruneï, le Viêt-nam, le Chili, le Mexique et le Pérou.

Marc Angrand pour le service français, édité par Véronique Tison

par Rachel Armstrong et Masayuki Kitano