* USA-Menace de droits de douane de 25% sur l'automobile

* Un Brexit sans accord déboucherait sur de nouvelles taxes

* L'Allemagne particulièrement vulnérable aux deux risques commerciaux

* Ce double coup dur pourrait plonger l'économie dans la récession

* Source : Berlin envisage un soutien fiscal pour parer à la crise

par Michael Nienaber

BERLIN, 1er mars (Reuters) - L'Allemagne est confrontée aux risques d'une forte augmentation des droits de douane américains sur l'automobile et d'un Brexit sans accord, un double coup dur qui pourrait mettre un terme à dix années de croissance pour la première économie d'Europe.

La chancelière Angela Merkel et ses ministres préparent en sous-main des mesures pour limiter les dégâts s'il s'avérait que le scénario du pire se réalisait.

Face à la menace de récession, le ministre des Finances Olaf Scholz est prêt à assouplir des règles habituellement très strictes en Allemagne en matière de dette, a déclaré à Reuters un haut fonctionnaire du gouvernement.

"Si ce double coup dur se concrétise, il nous faudra sortir quelque chose de notre chapeau", a-t-il dit, laissant entendre que le gouvernement travaillait sur un plan de soutien budgétaire.

Le ministère des Finances s'est abstenu de tout commentaire.

L'Allemagne, qui a tout juste échappé à la récession en 2018, est particulièrement vulnérable aux éventualités de droits de douane sur l'automobile, que Donald Trump menace de porter à 25%, et d'une sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne (UE) le 29 mars sans accord.

Les exportations représentent près de la moitié de la production du pays et les voitures sont de loin son premier poste d'exportation avec 230 milliards d'euros de ventes par an, selon les données de l'Office fédéral de la statistique.

Les Etats-Unis sont la première destination à l'export des voitures allemandes, avec un chiffre d'affaires de 27,2 milliards d'euros, suivi par la Chine (24,7 milliards) et la Grande-Bretagne (22,5 milliards), selon ces statistiques.

En nombre de voitures, le Royaume-Uni passe devant les Etats-Unis, avec 666.000 voitures importées contre 470.000, selon les chiffres de la fédération professionnelle VDA.

Le département américain du Commerce a remis le 17 février à Donald Trump un rapport sur la menace que représenterait le secteur automobile européen pour la sécurité nationale des Etats-Unis, une étape qui pourrait ouvrir la voie à l'instauration de droits de douane de 25% sur les véhicules et pièces détachées européennes importés. Le président américain dispose d'un délai de 90 jours pour décider de suivre ou non les recommandations du département du Commerce.

Parallèlement, un Brexit sans accord ferait retomber le Royaume-Uni au rang de pays tiers dans le cadre des règles de l'Organisation mondiale du Commerce (OMC). Ce statut porterait les droits de douane britanniques à environ 10% sur les voitures allemandes et jusqu'à 22% sur les camions et les pickups.

CERCLE VICIEUX

Si ces deux scénarios se réalisaient, ils pourraient retrancher 0,7 point à la croissance du produit intérieur brut allemand à long terme, selon des estimations de la Commerzbank et de l'institut Ifo.

Berlin prévoit un ralentissement de la croissance du pays à 1% cette année contre 1,4% en 2018. Mais ces prévisions sont fondées sur l'hypothèse qu'une escalade du conflit commercial avec les Etats-Unis et un Brexit sans accord peuvent être évités.

"En cas de Brexit désordonné, il y aura des effets négatifs de court terme tels qu'une incertitude accrue et des processus d'ajustement, encore que ces effets soient difficiles à quantifier", souligne un porte-parole du ministère de l'Economie.

Toutefois, des études ont conclu qu'un Brexit sans accord pourrait coûter 0,2 point de pourcentage de croissance par an à l'Allemagne à long terme, ajoute-t-il.

De même, les exportations de voitures allemandes aux Etats-Unis pourraient chuter de près de 50% à long terme si Donald Trump imposait une surtaxe à l'importation, selon l'institut Ifo.

"Cela réduirait la croissance du PIB allemand d'environ 0,5 point", dit l'économiste de Commerzbank, Jörg Krämer.

Pour l'économie allemande dans son ensemble, ces deux risques pourraient en outre affecter le climat des affaires et le moral du consommateur et entraîner l'économie dans un cercle vicieux, ajoute-t-il. (Juliette Rouillon pour le service français, édité par Wilfrid Exbrayat)